Marqué par l'expérience de l'exil, ce volume témoigne d'un moment à la fois biographique et historique au cours duquel, comme nombre d'artistes et savants juifs européens, Claude Lévi-Strauss est réfugié à New York. Écrits entre 1941 et 1947, alors qu'il n'a pas encore délaissé ses réflexions politiques, les dix-sept chapitres de ce livre restituent une préhistoire de l'anthropologie structurale.
Ces années américaines sont aussi celles de la prise de conscience de catastrophes historiques irrémédiables : l'extermination des Indiens d'Amérique, le génocide des Juifs d'Europe. À partir des années 1950, l'anthropologie de Lévi-Strauss semble sourdement travaillée par le souvenir et la possibilité de la Shoah, qui n'est jamais nommée.
L'idée de « signifiantzéro» est au fondement même du structuralisme. Parler d'Anthropologie structurale zéro, c'est donc revenir à la source d'une pensée qui a bouleversé notre conception de l'humain. Mais cette préhistoire des Anthropologies structurales un et deux souligne aussi le sentiment de tabula rasa qui animait leur auteur au sortir de la guerre et le projet - partagé avec d'autres - d'un recommencement civilisationnel sur des bases nouvelles.
Le lien social se nourrit de quelque chose qui n'est pas social. Tel est le propos de cet essai d'infra-politique dans lequel la philosophe Catherine Perret, explorant la naissance de la pédopsychiatrie et l'histoire des politiques de l'enfance en France au XXe siècle, rencontre Fernand Deligny (1913-1996).
De plus en plus étudié en Europe et aux États-Unis, Deligny est aujourd'hui encore un célèbre inconnu. Wikipédia le présente comme « un opposant farouche à la prise en charge asilaire des enfants difficiles ou délinquants et des enfants autistes ». C'est oublier qu'il fut également conteur, écrivain, cinéaste, cartographe, et que les inventions plastiques et poétiques de ce bricoleur de génie contribuent pour une large part à ses expérimentations cliniques.
Dans ce livre, Catherine Perret inscrit Deligny dans l'histoire des révolutions psychiatriques qui, suite à l'« extermination douce des fous » dans les hôpitaux psychiatriques français durant la Seconde Guerre mondiale, surent faire de la folie une perspective sur l'humain et du soin psychique une pratique sociale.
Les expérimentations éducatives et cliniques de Deligny, ses inventions plastiques éclairent ce qui, chez les humains, vise à la création d'un milieu : un milieu loin du langage et qui ne se laisse capter qu'en images.
Catherine Perret montre que la prise en compte sans exclusive de l'humain ne dépend pas seulement de la capacité qu'auraient les sociétés à inclure de plus en plus d'individus dans le respect de leurs différences. Elle dépend aussi de leur capacité à prendre acte de la différence entre la part civilisable de l'homme et son noyau non civilisable, mais pourtant humain. C'est par là que son essai rejoint l'agenda politique de l'anthropologie contemporaine.
Ce volume rassemble des textes publiés entre 1969 et 1977. Au-delà de sa diversité, le gai savoir de Pierre Clastres y déploie une même recherche de l'être social primitif, pensé non plus sous le signe d'une absence, mais comme formation sociale achevée, s'instituant dans sa logique singulière.
Cette anthropologie politique se fonde sur la discontinuité radicale des sociétés sans État et des sociétés à État. Trois questions la constituent : qu'en est-il, dans la société primitive, de l'économie ? Qu'en est-il de la guerre ? Qu'en est-il de la religion ? - questions subordonnées à une interrogation fondamentale sur la politique sauvage, donc sur l'origine de l'État. Question transformée en ce qu'elle s'énonce désormais : à quelles conditions une société cesse-t-elle d'être primitive ?
Parti de l'ethnologie, Pierre Clastres, dans sa confrontation avec La Boétie, Hobbes, Rousseau, fait oeuvre de philosophie politique. L'approche ethnologique entraîne une conversion du regard. Pour qui pense le « malencontre », fait de nouveau question quelque chose qui ne va absolument pas de soi : l'État.
On trouvera ici : le dernier cercle. - Une ethnologie sauvage. - Le clou de la croisière. - De l'ethnocide. - Mythes et rites des Indiens d'Amérique du Sud. - La question du pouvoir dans les sociétés primitives. - Liberté, malencontre, innommable. - L'économie primitive. - Le retour des Lumières. - Les marxistes et leur anthropologie. - Archéologie de la violence : la guerre dans les sociétés primitives. - Malheur du guerrier sauvage.