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" c'est une hérésie de penser que l'esprit est mobile et l'essence des choses statique ; que l'essence est pure comme le cristal et l'apparence turbide ".
citant dôgen, le grand mystique zen du xiiie siècle, salah stétié commente : " je crois voir là une clé de l'être-au-monde japonais et de l'esthétique nippone dans son ensemble, dont kyôto porte à la fois le sens et le non-sens ". a touches discrètes, entrelaçant description, narration, interprétation, l'auteur parcourt les lieux sacrés, héritage de mille ans d'histoire, sans que le chemin et le legs ne soient ni touristiques, ni platement patrimoniaux: c'est " toute l'âme résumée " du japon qu'il fait pressentir et rend presque palpable, ces " images du monde flottant " dont parle le dit du genji, que chacun des ensembles de temples et de jardins module et recompose, faisant de la " ville de la sérénité et de la paix ", heian-kyô, le centre du monde, microcosme de l'univers, depuis l'époque de heian, au début du ixe siècle, jusqu'à celle du meiji quand, en 1868, la capitale est transférée à tokyo.
plus encore que le contexte historique, l'évocation des mythes fondateurs est ici primordiale : celui du couple divin izanagi/izanami d'oú naît la déesse du soleil, amatérasu, ancêtre du premier empereur ; ou celle du dieu-renard inari et des autres kamis. ils éclairent les rites du shintô, la " voie des dieux ", cadre omniprésent de la civilisation japonaise, auquel s'agrègent les apports de la chine - confucianisme et taoïsme - et du bouddhisme mahâyanâ, venu de corée dès le vie siècle: zen et paradis d'amida, " vie et lumière sans limites ", dont tant de temples et de jardins portent la marque, au premier rang desquels le pavillon d'or, le byôdô-in et le sanzen-in.
le jardin est parcours, jardin-promenade-source-lac, selon sa dénomination classique. le livre secret des jardins (xxiie siècle), s'inspirant de la peinture chinoise " montagne/eau ", shan sui, en prescrit les jalons : fusion dans la topographie, restitution de paysages célèbres, disposition rituelle des pierres, des cours d'eau et des lacs, îles, ponts et arbres. le " paysage emprunté ", shakkei, intègre les éléments extérieurs de la nature à la composition du jardin et du temple, tel le mont hiei pour la villa impériale, shûgaku-in.
le jeu incessant de l'intérieur et de l'extérieur, ne livrant de l'ensemble que vues mouvantes et aperçus fugaces, depuis les engawas, vérandas latérales, à travers les cloisons translucides (shoji) ou peints en trompe-l'oeil sur les fusumas, est le contrepoint essentiel à la fixité, à la répétition obsessionnelle des formes. jusqu'aux " jardins secs ", kare-sansui, du saihô-ji, du daisen-in et du ryôan-ji, le chef-d'oeuvre absolu, configuration la plus réduite de l'univers, rectangle plat de 200 mâ²de sable blanc, jonché de quinze pierres éparses l'ensemble n'en peut jamais être saisi d'un seul regard, la fixité du sable figure son contraire, le mouvement de l'océan, la vacuité du tout (il est mutei, " jardin du néant ") s'ouvre à tous les symboles de la cosmogonie.
c'est ce rythme que les photographies et la mise en pages du livre reproduisent, les jeux de miroirs de l'un et du multiple, de l'infinie variation sur le même thème, oú l'effet de surprise renforce, loin de la dissoudre, la pure sensation de l'être. tout est donc résonance et correspondances, dialogues en rêve, comme l'écrit le grand maître des jardins, musô soseki. et d'abord, avec les autres " voies " du raccourci tendu et tremblé : le haikai, le sabre, le tir à l'arc, le langage des fleurs, ikebana, le cha noyu, cérémonie du thé, les notes cristallines du shamisen, la guitare à trois cordes, le théâtre de poupées, bunraku, le travail du bois, ce tracé décisif de l'écriture, enfin, que l'auteur, dans une page magnifique, oppose à l'entrelacs mystique de la calligraphie arabe.
dialogue aussi avec notre sensibilité. sans jamais réduire à nos catégories occidentales, par de superficielles analogies, l'univers mental du japon dont kyôto est l'émanation suprême, l'auteur tisse un réseau d'échos et d'harmoniques oú se rejoignent les intuitions d'héraclite et d'ibn arabi, de stéphane mallarmé et de paul claudel, de roland barthes, henri michaux, yves bonnefoy, scrutateurs de cette " harmonie latente plus forte que l'évidente ", source de toute peinture, de toute musique, de toute poésie.
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né en 1953, bogdan konopka vit et travaille à wroclaw où, après une formation de photochimiste, il exerce la photographie appliquée au sein du laboratoire de l'université polytechnique. il en démissionne suite aux pressions du régime, devient membre du courant photographie élémentaire, s'en détache, fonde sa propre galerie, post scriptum, et participe aux actions artistiques de l'underground, tout en photographiant sa ville et son climat apocalyptique. il arrive en france en 1989 où il poursuit son travail sur le devenir des villes. il photographie leurs faces cachées, fragiles " non comme le seul prétexte à une accumulation désespérante, ni comme illusion d'une conquête, mais comme retrouvailles d'un sens, perception d'une écriture terrestre, d'une géographie dont nous avons oublié que nous sommes les auteurs ", faisant sienne la réflexion de georges perec. grand prix européen de la photographie de la ville de vevey en 1998, il voyage pendant deux ans en europe centrale. ce travail intitulé reconnaissances prend la forme d'une exposition et d'un portfolio. aujourd'hui, son regard attentif et patient se porte sur les villes chinoises et leur architecture vernaculaire très menacée. représenté par la galerie françoise paviot à paris, le travail de bogdan konopka est présent dans les collections publiques (musée national d'art moderne/centre georges pompidou, maison européenne de la photographie, fonds national d'art contemporain, fonds régional d'art contemporain ile-de-france...) et privées. pierre haski est journaliste, ancien correspondant du journal libération en chine. il est l'auteur du journal de ma yan (ramsay, 2002), du sang de la chine (grasset, 2005) et de cinq ans en chine (les arènes, 2006). pierre haski est le cofondateur du site internet d'informations www.rue89.com.
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Aux antipodes des clichés, yves gellie parcourt la chine dans sa diversité et livre d'étonnantes photographies des provinces du yunnan, du ningxia, du hubei, du qinghai et de hainan, en passant par hong kong et pékin.
Son parti pris : coller au champ visuel des chinois et montrer la réalité de leur quotidien en se focalisant sur les objets et les décors, parce qu'ils dévoilent une personnalité et permettent de saisir une intimité. le photographe s'attache à des éléments tels qu'une table dressée pour le petit-déjeuner d'un cheminot ou le plafond décoré de la chambre de jeunes mariés... il se dégage de cette collection d'images à la surprenante beauté une multitude de signes enchevêtrés qui ont tous pour support la trace, l'usure, la couleur, la matière.
Les objets et les décors, libérés de toute présence humaine, laissent percevoir alors avec une infinie précision les mutations d'une société devenue, en l'espace d'une décennie, le symbole même de la globalisation.
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Istanbul
Jean-claude Guillebaud, Marc Riboud
- Actes Sud
- Imprimerie Nationale
- 20 March 2003
- 9782743304461
1950-2000 : cinquante années du destin de la " ville des villes ", fragments de l'étonnante pérennité de cette cité aux trois noms, sise sur la fracture du bosphore, et habitée par un éternel mouvement de balancier entre orient et occident.
En ouverture, jean-claude guillebaud, rappelant les cycles de l'histoire qui modelèrent istanbul, met en évidence sa démesure et la fascination qu'elle exerça, et exerce encore, sur tous ceux qui la découvrent. pour donner à voir l'unité et la continuité d'istanbul dans le temps, marc riboud choisit - apparent paradoxe - le mode de la brisure et nous offre une mosaïque composée d'instantanés, de moments éphémères et anodins, d'oú surgissent les étapes d'un voyage de mémoire dans les rues et les ruelles.
Il naît de cette rencontre entre un lieu et un homme une image sensible et changeante, traversée de tremblements, tout aussi fidèle à la réalité de la ville qu'à la sensibilité de l'artiste ; image non pas glacée, esthétique, " éternelle " mais image essentielle d'istanbul, " toujours prête à tenter le destin de l'autre côté du bosphore, à accueillir le foisonnement du monde et à le faire sien ". ce que montrent les photos de marc riboud, c'est l'extraordinaire capacité de cette ville protéiforme à s'adapter aux évolutions et aux révolutions, à la diversité des hommes, à vivre du changement et de l'apparente contradiction, à l'image de cet étonnant cliché oú trois femmes voilées de noir défilent avec assurance, fierté et envie devant un couple enlacé, partagé entre l'ostentation et la gêne.
Le livre ne fait pas du temps qui passe un ferment de destruction, bien au contraire. si istanbul est ainsi installée dans la durée sans être seulement une " ville chargée d'histoire " c'est parce qu'elle réunit la mémoire du passé et les séductions du présent dans une osmose parfaite, perceptible dans cette photographie qui met en regard, de part et d'autre d'une affiche publicitaire, les visages d'un vieil homme et d'une jeune fille.
Le temps semble s'annuler dans le regard de l'homme, indissociable de celui de l'artiste. livre de mémoire et de mouvements, livre de regards croisés. celui des habitants d'istanbul sur le photographe - regards discrets, parfois envieux, parfois coquets de femmes derrière leur voile ; celui, mystérieux, de l'objectif lui-même qui fait surgir d'une scène banale dans un café, dans la rue, ou du grouillement illisible d'istanbul l'association inattendue de l'ancien et du moderne, de l'orient et de l'occident, le génie unique du lieu.
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Ces Carnets disent une expérience de la Chine dans son rapport à l'islam. Ils nous entraînent vers le Xinjiang. Gigantesque territoire d'un million de kilomètres carrés, constitué de treize minorités ethniques, le Xinjiang est un nom à programme. En langue chinoise, Xinjiang signifie " Nouvelle Frontière ". Le gouvernement central de Pékin lui a ajouté l'appellation " Weiwuer zizhiqu ", littéralement " Région autonome "ouïghoure" du Xinjiang ", désignant l'ethnie majoritaire non Han dont le nombre dépasse la dizaine de millions. Les Ouïghours, peuple turcophone acquis à l'islam des confréries, appellent ce pays autrement : le Turkestan. Vue de Pékin, cette région constitue un front pionnier. Vue des oasis ou du désert du Taklamakan, il s'agit d'une mer intérieure. Il y a un siècle, cette partie du monde demeurait la seule à ne pas avoir été cartographiée. Les temps ont changé : des routes, des aéroports ont été aménagés. Des vagues de migrants Han s'y établissent comme au Tibet voisin, boule-versant les modes de vie traditionnels. Les tensions s'accroissent. Des attentats ont lieu. Des résistances s'organisent, passives dans la majorité des cas. Elles témoignent cependant d'une chose : le grand rêve national de l'Etat chinois rencontre ses limites. Les frustrations identitaires et religieuses des Ouïghours suffiront à nourrir pour longtemps des foyers de conflits.
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Guided solely by chance encounters, a photojournalist and his 11-year-old son crisscrossed and photographed a country in the throes of total economic and cultural revolution: Mongolia. They relate their conversations and take snapshots of their exchanges with people composing today's Mongolia: painters, poets, doctors, miners and nomads, and reveal the country's many contrasts, unveiling its face's previously hidden side. An imperfect cross-sectional view of Mongolia: two photographic approaches to a changing world.
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Voila plus de trente ans que la Chine s'agite en étonnantes métamorphoses, bousculant un équilibre économique et culturel mondial dont elle a longtemps été isolée. Vu l'ampleur de ces mutations, il est de plus en plus délicat d'esquisser un portrait fidèle de la Chine actuelle.
Jouissant auprès de ses pairs chinois d'une notoriété établie, Yann Layma a rassemblé ici une quinzaine de photographes, parmi les meilleurs de la Chine contemporaine. Il en a retenu 140 images puissantes (associées aux siennes) qui captent avec justesse l'essence de ce pays, souvent mal connu de l'Occident.
Chaque photographe exprime son point de vue sur son travail, son pays et l'avenir de celui-ci dans un court texte introductif.