Comment un caractère typographique est-il dessiné ? Qu'est-ce qui différencie les familles de caractères ? À quoi servent les pictogrammes ? Ce Cahier d'exploration graphique est un livre-jeu permettant la découverte des fondamentaux du design graphique. En cinq séquences - typographie, affiche, signes, identité visuelle et mise en pages - Sophie Cure et Aurélien Farina nvitent le lecteur à prendre conscience de la multitude de signes qui, jour après jour, façonnent notre quotidien et le chargent de sens. Commencer à s'intéresser au design graphique, c'est commencer à observer et comprendre le monde qui nous entoure et les objets qui le façonnent : que ce soit un panneau stop, un emballage de corn-flakes, une pochette de disque psychédélique, le titrage aguicheur d'une couverture de magazine, la typographie plus discrète d'une page de roman, une enseigne de pharmacie qui clignote ou encore le générique d'un film de science-fiction
Dans Femme, indigène, autre, Trinh Minh-Ha explore la question de l'écriture d'un point de vue postcolonial et féministe. Ce livre qui s'inscrit à l'intersection de plusieurs domaines - critique littéraire, anthropologie, études culturelles, études de genre - juxtapose de nombreux discours contemporains issus des cultures dominantes afin de bousculer les normes de l'écriture littéraire et académique. Tout en s'adossant aux grands monuments de la discipline (Roland Barthes, Jean-Paul Sartre, Virginia Woolf, etc.) Trinh Minh-Ha remet en cause l'orthodoxie stylistique et théorique exigée dans le processus de production de connaissances et d'oeuvres littéraires afin d'établir un nouveau rapport au langage. Se faisant, elle interroge les usages d'une nouvelle génération de théoriciennes féministes postcoloniales, donnant la voix à des femmes de couleurs qui remettent en question le discours majoritaire en éclairant des métarécits situés, une approche non-linéaire et ouverte de l'écriture. En s'éloignant des modèles et discours académiques traditionnels, Femme, indigène, autre propose de nouvelles « manières de savoir » qui performent une forme de langage alternative, plus proche des traditions orales et spontanées des communautés indigènes. Prenant appui sur sa propre histoire personnelle, l'autrice restitue les échos de l'histoire de sa grand-mère, conteuse au Vietnam, afin d'illustrer le rôle des femmes comme dépositaire d'un héritage ancestrale et donc créatrice de langage. À mi-chemin entre le livre théorique et l'oeuvre littéraire, cet ouvrage atypique publié en 1989 détone tant par sa forme que son propos et participe à la recherche d'une nouvelle façon d'articuler les luttes et recherches d'une génération d'écrivains et d'écrivaines. Le langage - et par association l'acte d'écrire - devient ainsi le miroir de la construction théorique des grandes luttes du XXIe siècle. Cet ouvrage, considéré comme un classique de la littérature féministe postcoloniale en langue anglaise, est le premier livre de Trinh T. Minh-Ha traduit en français. Avec une préface inédite d'Elvan Zabunyan.
Du charme dissimulé dans le quotidien au régime esthétique atypique de l'imagerie scientifique, de sa capacité inouïe à penser le vivant jusqu'à ses innombrables applications littéraires, philosophiques, techniques, historiques et artistiques, la beauté se révèle être un terrain intellectuel pluridisciplinaire particulièrement fécond. L'Abécédaire de la beauté ici présenté multiplie les axes de réflexion sur cette notion aussi galvaudée qu'insaisissable, mais qui, selon les 43 contributions réunies dans cet ouvrage, demeure au centre de nos recherches les plus actuelles et les plus vives. L'ambition n'est pas de réaliser une synthèse impossible des recherches sur la beauté, mais de collectionner les points d'accès multiples d'une pensée collective en train d'émerger. À l'inverse d'une encyclopédie, l'abécédaire joue de l'aléatoire des entrées et de l'arbitraire des lettres pour mettre au défi, à chaque fois, la notion de beauté et voir en quoi elle est un levier de questionnements et de perspectives nouvelles de recherches. Chaque entrée est conçue non pas comme une synthèse rétrospective mais comme une interrogation prospective. De Frédéric Worms (V comme vitale) à Elie During (F comme futur) en passant par Emmanuelle Pouydebat (Z comme zoo-esthétique), les textes composant cet abécédaire croisent des approches issues de domaines aussi variés que la sociologie, la physique, l'esthétique ou la philosophie. L'Abécédaire de la beauté est le fruit de l'activité de recherche et de formation de la Chaire Beauté·s de l'université PSL. Une vingtaine de thématiques sont accompagnées d'illustrations d'Icinori, conçues spécifiquement pour le projet.
Moving Earths et Inside constituent les deux premiers volets de la trilogie terrestre, une série de trois conférences-performances coécrites par Frédérique Aït-Touati et Bruno Latour. La triologie tente de remettre en question nos idées reçues concernant la planète, cette Terre que nous habitons comme nous marchons dessus, presque sans y penser.
Inside propose une expérience de pensée : le lecteur-spectateur est invité à se tenir non pas sur le Globe, mais dans cette « zone critique » dont parlent les scientifiques. Pour tenter de comprendre ce que signifie « vivre dedans », la conférence-performance tente une série de tests qui combinent les outils de la modélisation et de la simulation, soit deux manières de se rendre sensibles : par la science et par la scène.
Entre philosophie et théâtre, Moving Earths invite le lecteur à tester l'hypothèse d'un parallèle entre l'époque de la révolution astronomique et la nôtre. Sommes-nous en train de vivre une transformation du monde aussi profonde et radicale que celle de l'époque de Galilée ? Une chose est sûre : nous ne savons plus exactement sur quelle planète nous vivons, ni comment la décrire. En partant du travail du chimiste anglais James Lovelock et de la biologiste américaine Lynn Margulis, les auteurs interrogent un nouveau rapport au terrestre.
Ces deux pièces ont été créées au Théâtre Nanterre-Amandiers en novembre 2016 et décembre 2019, puis jouées sur de nombreuses scènes européennes et internationales (Théâtre de l'Odéon à Paris, Martin Gropius Bau à Berlin, Théâtre Benno-Besson en Suisse, Signature Theatre à New York, Biennale de Taipei).
Deux entretiens avec les auteurs complèteront les textes. L'ouvrage sera richement illustré, et la mise en page rejouera la mise en scène des textes dans l'espace du livre.
Premier volume de la collection Pratiques consacrée à l'analyse des arts performatifs, cet ouvrage se propose de documenter et d'archiver le contenu du cours d'interprétation dispensé par Oscar Gómez Mata aux étudiants de La Manufacture - Haute école des arts de la scène, à Lausanne. Depuis le début des années 2000, son approche pédagogique singulière, qui se se distingue par l'accent mis sur la notion de présence et sur la situation de jeu en représentation, a fait de la «?méthode?» Oscar Gómez Mata une référence incontournable en matière de formation de l'acteur. L'originalité de son travail de pédagogue réside dans sa considération de la pratique du métier d'acteur comme une matière à travailler et à entraîner plutôt que comme un acquis ou un don. Comment penser l'action?? Par quels termes la décrire, en quelles étapes la décomposer ? Comment analyser en mots ce qui constitue la présence singulière d'un acteur ? À travers la description de cette méthode pédagogique, ce livre contribue également à une réflexion générale sur le vocabulaire de la présence scénique et rend compte d'une recherche sur les termes employés pour décrire une activité qui, parce qu'elle s'inscrit dans le domaine du sensible, reste encore souvent mal identifiée. Le livre s'ouvre sur une introduction à la pédagogie d'Oscar Gómez Mata ainsi qu'une remise en contexte de sa pratique vis-à-vis d'autres méthodes de jeu ayant fait date comme celles de Constantin Stanislavski, Jerzy Grotowski ou Eugenio Barba. Cette analyse est complétée par un entretien portant sur les objectifs de la méthode proposée et sur ses enjeux esthétiques. Cinq exercices pratiques sont ensuite détaillés (« Des gens qui marchent », « Émetteur/Récepteur », « Poser sa ‹ présence rien faire › », « La boule en plomb », « Trois bassins ») afin de donner au lecteur des exemples d'application concrets de cette méthode pédagogique. Ce livre devient ainsi un manuel pratique à l'usage des comédiens en formation et aguerris.
Riding Modern Art est un livre de photographie, consacré aux processus d'appropriation et de remploi par les skateurs des sculptures dans l'espace public, utilisées comme autant de supports pour leurs figures. Cette pratique de l'oeuvre d'art est perçue par l'artiste Raphaël Zarka comme vecteur du dynamisme de la sculpture moderne, et questionne l'idée de mouvement dans ces oeuvres souvent abstraites et géométriques, d'inspiration cubo-futuriste ou constructivistes.
En rassembalnt une archive de cinquante photographies en noir et blanc de skateurs sur des scuptures dans l'espace public, Raphaël Zarka rend compte de l'hétérogéneité de cette pratique sur les plans technique, esthétique et conceptuels.
Si l'évolution générale de l'art ces dernières années est profondément marquée par la volonté de renouveler la manière d'intervenir dans l'espace, de construire le regard et de percevoir le rapport au spectateur, peu nombreux sont les artistes à avoir formellement exprimé leur intérêt pour cette pratique populaire. Celle-ci fait pourtant écho, dans le contexte de la sculpture moderne, au discours volontariste de nombreux artistes à l'égard d'une participation active du spectateur.
Sans être une « désobéissance », un acte consciemment symbolique, l'usage fait par les skateurs révèle une réification de l'oeuvre d'art, traitée ici comme un simple objet, un matériau, ou un ensemble de matériaux mis en forme, telle une étude intrinsèque de la mécanique des solides, dans la grande tradition galiléenne. Ils renouvellent ainsi nos perceptions de l'art dans l'espace public.
Terra Forma raconte l'exploration d'une terre inconnue :
La nôtre. Cinq siècles après les voyageurs de la Renaissance partis cartographier les terra incognita du Nouveau Monde, cet ouvrage propose de redécouvrir autrement cette Terre que nous croyons si bien connaître.
En redéfinissant le vocabulaire cartographique traditionnel, il offre un manifeste pour la fondation d'un nouvel imaginaire géographique et, ce faisant, politique. Écrit sur le mode du récit d'exploration, cet ouvrage invite le lecteur à explorer les techniques de représentation sur divers terrains, dans le but de constituer progressivement et collectivement un atlas d'un nouveau genre.
Pour un artiste comme Raphaël Zarka, le skateboard est avant tout une affaire de formes. Formes du repos, formes du mouvement, elles parcourent sourdement l'histoire de l'art et des sciences, de Galilée à Robert Morris. L'architecture urbaine, mais aussi les modules des skateparks, leur font étrangement écho.
Quant à la pratique du skateboard, comme le montre La Conjonction interdite (2003), elle revient toujours à opérer une sorte de « montage » parmi la diversité de matières et de formes offertes par la ville, en dynamisant ou en déstabilisant les structures conçues pour le repos et le confort, au point d'en inverser les fonctions et le sens.
Dans Pour une esthétique de l'émancipation, Isabelle Alfonsi emprunte à la philosophe Geneviève Fraisse le concept de « lignée » et exhume des pratiques artistiques du passé, afin de faire émerger une lecture féministe et queer de l'art contemporain. Ce texte cherche à montrer comment l'écriture de l'Histoire de l'art avec un grand H a minoré l'importance des engagements affectifs des artistes, rendant ainsi inopérante la portée politique de leurs oeuvres. Les pratiques de Claude Cahun ou Michel Journiac sont ainsi replacées dans le contexte du militantisme de défense des droits des homosexuel-le-s de leurs époques respectives. L'histoire du minimalisme états-unien est revisitée à travers ses figures les plus périphériques afin de lire Lynda Benglis et ses productions des années 1970 comme les premières représentations d'un féminisme pro-sexe, comprendre Lucy Lippard à travers le prisme de la formation d'une critique sociale radicale et féministe ou encore de voir l'expression de subjectivités féminines dans les recherches filmiques d'Yvonne Rainer. Isabelle Alfonsi entend ainsi participer à l'écriture d'histoires de l'art plurielles, incarnées et affectives, et met l'accent sur l'importance du contexte social, politique et personnel dans l'interprétation des oeuvres.
Ouvrage iconique de théorie sociologique, Paris ville invisible interroge la notion de collectif sous l'angle du texte et des images. À travers ce reportage photographique réalisé à la fin des années 1990, Émilie Hermant et Bruno Latour ont entrepris de décortiquer ce qui constitue l'unicité de Paris, tant sur le plan sociologique que celui de l'urbanisme.
Paris se donne si facilement au regard des peintres et des touristes, elle a si souvent été le sujet de beaux livres ou de photographies qu'on en oublie les difficultés des milliers d'ingénieurs, de techniciens, de fonctionnaires, d'habitants et de commerçants, pour la rendre visible.
Ce livre tente, par le texte et par l'image, de cheminer à travers la ville en explorant quelques-unes des raisons qui nous empêchent de l'embrasser facilement d'un seul coup d'oeil.
Sous la forme d'une enquête photographique, Bruno Latour et Émilie Hermant nous font visiter des lieux, habituellement fermés aux passants, dans lesquels s'élaborent les innombrables techniques qui rendent la vie possible aux Parisiens (service des eaux, préfecture de police, périphérique, etc.) ces lieux dits « panoptiques » d'où l'on voit Paris tout entier.
À travers une observation fine et une réflexion sur l'importance des objets ordinaires comme par exemple la signalétique qui offre aux habitants les moyens de parcourir la ville sans s'y perdre aussitôt, cet ouvrage entreprend d'analyser ce qui « constitue » la ville de Paris.
En termes d'architecture, d'urbanisme et sur le plan sociologique, comment pourrions-nous analyser les problèmes pratiques que pose la coexistence d'un si grand nombre d'individus sur une si petite surface ? Et en quoi cela contribue-t-il à redéfinir ce que nous entendons par le terme de « collectif », si souvent utilisé dans le discours social et politique ?
Chacun de ces cheminements inattendus permet ainsi de reposer une question plus théorique sur la nature du lien social et sur les façons bien particulières qu'a la société de rester insaisissable. À une période où l'on oppose souvent le réel et le virtuel, la dure réalité urbaine et les utopies électroniques, cet ouvrage cherche à montrer que les villes réelles ressemblent de manière inattendue aux « Villes invisibles » d'Italo Calvino.
La Conjonction interdite est en quelque sorte une introduction à la pratique du skateboard. L'auteur a cherché à décrire le skateboard définissant sa place parmi la diversité des jeux et des manières de jouer.
Le skateboard (et plus généralement les sports dits « de glisse »), les jeux et les manières de jouer, tout comme les pratiques artistiques d'ailleurs, se sont considérablement étendus et complexifiés au cours de ces cinquante dernières années. Dans une position qui n'est pas sans rappeler l'intérêt d'artistes tels que Dan Graham ou Robert Smithson pour les cultures populaires, Raphaël Zarka définit ici les spécificités de cette pratique tout en décrivant les relations particulières qu'elle entretient avec la ville et certains de ses espaces.
Qu'advient-il de l'économie lorsqu'elle est pensée, inventée, et rêvée par les artistes ? On le sait peu, mais nombreux furent lceux qui, de la fin du XIXe siècle jusqu'à aujourd'hui, se firent un temps économistes, allant jusqu'à rédiger de véritables traités dont l'ambition affichée était de renouveler la discipline de fond en comble.
Qu'ils aient suivi une formation universitaire en économie (tels Vassily Kandinsky ou Robert Filliou), construit leur conception théorique de l'art en dialogue avec des économistes (comme William Morris ou Joseph Beuys), ou élaboré un système théorique à part entière (à l'instar d'Asger Jorn ou d'Isidore Isou), ces artistes nous livrent une vision riche et singulière, tant sur la pensée économique de leur temps que sur les enjeux d'aujourd'hui. Valeur, travail, monnaie et capitalisme - autant de thèmes scrutés et revisités par ces textes, dont le présent ouvrage se propose de faire l'anthologie.
Avec humour ou sérieux, érudition ou provocation, ces essais font de l'expérience de l'art un laboratoire théorique et pratique pour repenser l'économie dans son ensemble, aspirant à rien de moins, chez Isou par exemple, qu'à provoquer « un bouleversement capital, une transformation fondamentale du système monétaire et de la structure bancaire du monde entier ». En réunissant ces « propositions », modestes ou non, souvent méconnues, parfois traduites pour la première fois en français, l'ouvrage propose la généalogie d'une forme paradoxale - un traité d'économie écrit par un non-économiste -, et en expose les limites et la pertinence pour penser l'art et l'économie aujourd'hui.
La série Ways of seeing pour la chaîne BBC. Constituée de quatre essais audiovisuels, elle soulève des questions liées aux idéologies cachées des images visuelles. La série a reçu un grand succès et a donné naissance l'année suivante à un livre du même nom écrit par John Berger. Une édition française est parue en France en 1976 sous le titre Voir le voir.
L'édition anglaise d'origine fut le fruit d'une collaboration de John Berger avec le designer graphique Richard Hollis avec lequel il avait déjà travaillé pour le magazine New Society et son roman G. Ensemble, avec Mike Dibb et l'aide de Chris Fox à l'édition du texte ainsi que de l'artiste Sven Blomberg, ils ont publié cet ouvrage en coédition avec la BBC et Penguin.
La traduction anglaise de L'oeuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité technique venait juste d'être la BBC donnait carte blanche à John Berger pour créer cette série de films télévisés. Il décida alors pour le premier film de partir du texte de Benjamin aujourd'hui célèbre pour le traduire de manière plus accessible pour la télévision.
Le second et troisième film ont été construits à partir de textes préexistants de John Berger sur le nouveau matérialisme de la traduction picturale européenne ainsi que de morceaux de son roman G.
Le quatrième film a été créé de toutes pièces à partir de l'observation qu'il fait de l'usage d'une forme d'autorité de l'art européen par les publicitaires.
Si la société s'est beaucoup modifiée depuis 1972, reflétant aujourd'hui plus largement les valeurs du modèle capitaliste qu'à l'époque de l'écriture de ce texte, l'enjeu politique reste cependant le même quant à la place et la fonction de l'art du passé dans notre civilisation.
En nous montrant comment voir différemment des tableaux que tant de musées présentent comme des reliques sacrées, John Berger nous invite à une réappropriation critique de notre héritage culturel, à une reprise à notre compte d'une histoire qu'on entoure délibérément de de barrières inutiles pour nous empêcher d'y puiser des raisons d'agir.
S'appuyant sur près de 160 reproductions
Dans cet essai au verbe acéré, Paul Gilroy dénonce la pathologie néo-impérialiste des politiques mises en oeuvre dans les pays occidentaux, sclérosées par les débats sur l'immigration, et propose en retour un modèle de société basé sur un multiculturalisme renouvelé. De la création du concept de "race" à la formation des grands empires coloniaux, le sociologue britannique soulève quelques grandes questions de notre siècle, et vise à former une réelle alternative aux récits édulcorés et "whitewashés" de notre passé colonial.
En choisissant de valoriser la convivialité et le cosmopolitanisme ordinaire et indiscipliné des centres urbains des grandes métropoles, Paul Gilroy embrasse une vision cosmopolite inclusive, croit en l'avènement d'une société "au-delà du racisme" et défend un modèle de société multiculturel, qui refuse de céder aux discours de la peur et à la violence. Il examine l'invention de catégories hiérarchisantes basées sur la notion de race, et les terribles conséquences que celle-ci eut, telle que le colonialisme et le fascisme, et démontre comment les écrits de penseurs tels que Frantz Fanon, W.
E. B. Du Bois ou Georges Orwell peuvent aujourd'hui encore faire avancer les débats sur le nationalisme, le postcolonialisme et les questions raciales. Cette première traduction de Mélancolie post-coloniale sera accompagnée d'une préface inédite de l'auteur, apportant un regard contemporain sur les enjeux traités par le livre et faire écho aux luttes post-coloniales d'aujourd'hui, en recherche d'une pensée critique exigeante.
Le Catalogue de la mort est une exploration décomplexée de la dernière grande étape de notre existence : la mort. Dans cet ouvrage à la fois drôle et érudit, Bunpei Yorifuji aborde tous les aspects imaginables du « passage vers l'au-delà » :
Où meurt-on le plus ? De quelles causes ? Qui vit le plus longtemps ? Quelles sont les cultures où l'on craint le plus la mort et comment la représentent-ils ? Quelles sont les meilleures (et pires) façons de mourir ?
Bref : qu'est-ce que la mort?
À cette interrogation naïve, l'auteur répond comme à son habitude en texte et en image, mêlant dessins humoristiques et recherche approfondie. Fort d'une culture japonaise où ce sujet est appréhendé de manière décomplexée, Bunpei Yorifuji s'adresse dans cet ouvrage autant aux adultes qu'aux plus jeunes. Un livre à mettre entre les mains de toutes celles et ceux qui cherchent à aborder avec finesse le thème de la mort.
La gentrification des esprits est un retour captivant sur les « années SIDA » et l'activisme d'ACT UP dans le New York des années 1980 et 1990. Sarah Schulman, elle-même new-yorkaise et militante de la cause LGBT, se souvient de la disparition, pratiquement du jour au lendemain, de la culture rebelle queer, des loyers à bas coûts et du prolifique mouvement artistique qui se développait au coeur de Manhattan ; remplacés par des porte-parole gays conservateurs, ainsi que par le consumérisme de masse. Sarah Schulman décrit avec précision et engagement le « remplacement d'une communauté par une autre » et le processus de gentrification qui toucha ces quartiers concomitamment à la crise du SIDA.
Schulman fait revivre pour nous son Lower East Side tel qu'elle l'a connu. Elle emplit les pages de ce livre de la réminiscence vivace de ses ami-e-s de l'avant-garde queer, autant que de l'ombre inquiétante des premières années de la crise du SIDA, telles que vécues par une politiste. Les souvenirs personnels s'entremêlent à une analyse percutante des deux phénomènes, et du poids invisible qu'ils font aujourd'hui peser sur la société américaine. Schulman rend compte de son expérience en tant que témoin de la « perte de l'imagination » de toute une génération, et des conséquences entraînées par cette perte.
Mes écoutes est un projet entamé par Dominique Petitgand en 2004, en parallèle de son travail de création sonore. Rassemblant des textes inédits ou ayant été initialement diffusés sous forme d'extraits lors de performances ou d'installations, cet ouvrage en constitue la première version complète. À travers ces 170 courts textes, Dominique Petitgand décrit comment, dans diverses situations de sa vie quotidienne, il écoute. Semblable à une traversée des lieux et des temps, cette évocation des sons en leur absence constitue une fiction possible autour de quelques thèmes : le parcours d'une journée du réveil au sommeil, l'écoute domestique ou urbaine, les déplacements, les règles d'usage de la conversation, la musique intérieure, ou encore l'obsession sonore. Pour chacune des situations décrites, le contexte, l'instant, la circonstance mais aussi la disposition mentale ou physique de la personne qui écoute, importent autant, sinon plus, que la description du son lui-même. Ce recueil fait ainsi place au son non-représentable et préfère déplacer la réflexion sur ses effets et sa réception plutôt que sur sa description. Il se concentre ainsi sur un point de détail, des résonances, des ressemblances, ou se contente parfois simplement d'énoncer une interrogation. Une attention particulière est alors portée à ce qui est indirect, se trouve à distance, ou se révèle après-coup. Chacun de ces textes peuvent être lus indépendamment les uns des autres ou en suivant l'organisation des ensembles proposés par Dominique Petitgand, et participent d'une même conception de l'acte d'écoute, ici pensé comme un outil filtrant la vie et s'insinuant au fil des jours dans les pensées de l'auteur.
Le Jeu de la guerre de Guy Debord. L'émancipation comme projet. On connaît Guy Debord pour avoir été poète, cinéaste, artiste, théoricien révolutionnaire, directeur de revue et fondateur de mouvements d'avant-garde. Mais il a surtout été stratège. Qu'entend-on par là ? Qu'il a utilisé la poésie, le cinéma, la théorie et l'avant-garde dans le cadre d'un conflit avec la société de son temps. Un objet en particulier dans la production de Guy Debord répond de cet objectif : le Jeu de la guerre, qui avait pour vocation d'aiguiser le sens stratégique et la conscience d'une lutte à mener. Au milieu des années 1950, Debord conçoit un jeu constitué d'un plateau quadrillé et de pions représentant les diverses unités d'une armée. En tant que modélisation de la guerre, ce jeu participe des recherches situationnistes sur l'environnement construit, la vie aliénée et les moyens de s'en émanciper. Tout au long de sa vie, Debord s'y exerce et cherche à le diffuser en dehors des cercles situationnistes. À l'heure où le design - qu'il soit d'objets, de systèmes, d'interfaces ou d'expériences - tend à envahir les discours et à englober de plus en plus de champs de l'activité créative, technique, sociale et économique, et alors que l'art ne cesse de repenser les conditions de sa validité critique, Emmanuel Guy propose ici une réflexion sur le rôle de la stratégie dans tout projet d'émancipation.
Considéré depuis le milieu des années 1990 comme la concrétisation de la troisième révolution industrielle, le numérique se matérialise aujourd'hui à travers des objets du quotidien (téléphone, montre, enceinte), des usages socioculturels (groupes d'échange, téléchargement, visionage de programmes audiovisuels), et des infrastructures réticulaires et interfacées (plateformes, moteurs de recherche, bases de données). De nombreux philosophes, sociologues, économistes, et psychologues ont déjà analysé et interprété les effets transformants du numérique, notamment la réorganisation de la société industrielle et l'émergence de nouveaux comportements. Dans ce texte inédit, Pierre-Damien Huyghe prolonge sa réflexion sur les bouleversements esthétiques inaugurés depuis l'avènement des techniques de reproduction et de diffusion qui nous permettent d'éprouver au quotidien le fait d'être ici et maintenant tout en ayant la possibilité d'être ici et là. Convoquant Walter Benjamin et Louis Sullivan, Pierre-Damien Huyghe propose une stimulante réflexion philosophique en mettant en tension d'un côté ce qu'il appelle « les poussées techniques », c'est-à-dire la mise en oeuvre industrielle des avancées scientifiques et technologiques, et de l'autre, le programme social et politique du design qui, en tant que discipline, doit penser ce processus de modernisation, l'accompagner, voire l'anticiper.
S'appuyant sur le postulat de Jürgen Habermas selon lequel la modernité est un « projet inachevé », Robin Kinross situe les débuts d'une véritable pratique moderne de la typographie aux alentours de 1700, avec la publication, en Angleterre, du premier traité de typographie, les Mechanick exercises (1683-1684) de Joseph Moxon, et la création du romain du roi en France. Il livre ici une histoire de la typographie moderne envisagée dans un sens large, bien au-delà du modernisme formel, en privilégiant les démarches et les praticiens qui, en Europe ou aux États-Unis, ont su articuler savoir et pratique - à l'instar des réformateurs anglais ou des membres de la nouvelle typographie.
En prenant en compte les avancées techniques et le contexte dans lequel les typographes opèrent, Robin Kinross met ainsi l'accent sur les aspects sociaux, politiques, techniques et matériels qui informent leur pratique. L'originalité de cet essai se situe à plusieurs niveaux : récit vivant et critique des développements de la typographie au cours des siècles, il est enrichi par des exemples représentatifs, rarement montrés auparavant, et propose une ouverture pour d'autres investigations.
Épuisé depuis plus d'un an, cet ouvrage est une proposition extrêmement bien documentée sur l'histoire de la typographie depuis le XVIIIe siècle. Lors de sa première publication en français en 2012, il venait combler un manque dans la théorie et l'histoire de la typographie par l'ouverture et la précision du point de vue critique de l'auteur. Riche d'une quarantaine d'illustrations (couleurs et noir et blanc), cet essai contient de nombreux documents historiques de référence (notamment français).
En croisant l'approche biographique et la forme de l'essai, ce livre donne une vision à la fois technique et accessible de l'histoire du design, à travers les yeux de l'un de ses plus grands critiques, Deyan Sudjic, directeur du Design Museum de Londres. Sans être un dictionnaire, B comme Bauhaus donne une définition érudite, bien que décalée, de notions allant d'Authenticité à Zip. Ce livre n'est pas non plus une autobiographie, même s'il offre une vision de l'intérieur, révélatrice et très personnelle de l'histoire contemporaine du design et de l'architecture.
B comme Bauhaus est un guide essentiel pour comprendre le monde qui nous entoure. Les objets abordés par cet ouvrage condensent nombre de problématiques qui ont rythmé l'histoire du design.
L'auteur en donne les clefs de compréhension de façon à la fois technique et critique, au travers de ces objets qui font aujourd'hui partie de l'imaginaire commun, comme le fauteuil Lounge des Eames ou l'Unité d'Habitation de Le Corbusier. Collecter, inventorier, classer, ces gestes humains sont ici détournés par le prisme de l'expérience personnelle.
Deyan Sudjic nous parle de ce qui fait d'un Warhol une authentique copie, de la création des identités nationales, de l'obsession de la collection. Il parle aussi de la vision de la ville depuis le rétroviseur de Grand Theft Auto V, des ornementations numériques et des raisons pour lesquelles nous accordons de la valeur à l'imperfection.
Ce livre parle des décors des films de Hitchcock et de la création des logotypes de Levis et de Coca-Coca, bref, de ce qui a créé l'univers de la mode, de la technologie, du design et du design graphique au XXIe siècle.
Dans Architecture de la contre-révolution Samia Henni analyse les politiques en matière d'urbanisme et d'architecture mises en oeuvre par l'État colonial français pendant la longue guerre d'indépendance algérienne (1954-1962) au croisement des vastes opérations militaires contre-insurectionnelles menées sur l'ensemble du territoire algérien. Tout au long de ce violent conflit armé, les autorités civiles et militaires françaises ont profondément réorganisé le vaste territoire urbain et rural de l'Algérie, transformé radicalement son environnement bâti, construit de nouvelles infrastructures en un temps record et implanté de manière stratégique de nouveaux centres de population afin de maintenir l'Algérie sous domination française.
Cet ouvrage montre de façon documentée et précise comment le régime colonial a planifié et mis en oeuvre des programmes de démolition tactique, et développé de nouvelles structures afin de faciliter le contrôle étroit de la population algérienne et la protection des communautés européennes en Algérie. Le travail de Samia Henni se concentre sur la teneur politique de trois stratégies spatiales contre-révolutionnaires interconnectées : le déplacement forcé massif de paysans algériens ; les programmes de logement de masse conçus à destination de la population algérienne dans le cadre du Plan de Constantine du général de Gaulle ; et la nouvelle ville administrative fortifiée censée permettre la protection des autorités françaises pendant les derniers mois de la Révolution algérienne. L'autrice s'applique à décrire le modus operandi de ces stratégies spatiales, leurs racines, leur évolution, leur portée et leurs effets, ainsi que les acteurs, les protocoles et les logiques de conception qui les sous-tendent.
Alors que Des écritures hiéroglyphiques à l'Isotype a été écrit entre 1943 et 1945, cette édition présente la toute première publication du texte dans sa version complète et a parue chez Hyphen Press en 2010. Le manuscrit original a été soigneusement révisé, sur la base des dix-sept dossiers d'ébauches manuscrites et dactylographiées laissés par l'auteur, par Matthew Eve et Christopher Burke, tout deux associés au projet de recherche « Isotype revisited » du département de typographie et communication graphique de l'université de Reading.
Le transformateur, publié en 2013 par B42 , abordait le travail d'Otto Neurath à travers un texte de sa collaboratrice Marie Neurath, et une éclairante analyse de Robin Kinross. Des écritures hiéroglyphiques à l'Isotype en représente le prolongement.