Chroma est le dernier livre de Derek Jarman. «Autobiographie par la couleur» d'un homme qui perd chaque jour un peu plus la vue, jusqu'à quasiment devenir aveugle, tandis qu'il en écrit les dernières pages sur son lit d'hôpital, et qui revient sur les couleurs du langage et des livres, les seules auxquelles il a désormais accès. «C'est pour cela que je n'ai pas voulu mettre de photo», écrit-il. Mais Chroma n'en reste pas moins plein de cet humour si particulier à l'oeuvre de Jarman, qui mêle à ses souvenirs d'enfance ou ceux d'une jeunesse «héroïque» dans les quartiers «rouges» de Londres, ses lectures érudites, des remarques toujours en demi-teinte sur la peinture et une réflexion sur le jeu des couleurs de fleurs sur la lande de Dungeness, où pousse son «dernier jardin».
La TAZ (Temporary Autonomous Zone), ou Zone Autonome Temporaire, ne se définit pas. Des "Utopies pirates" du XVIIIe au réseau planétaire du XXIe siècle, elle se manifeste à qui sait la voir, "apparaissant-disparaissant" pour mieux échapper aux Arpenteurs de l'Etat. Elle occupe provisoirement un territoire, dans l'espace, le temps ou l'imaginaire, et se dissout dès lors qu'il est répertorié. La TAZ fuit les TAZs affichées, les espaces "concédés" à la liberté : elle prend d'assaut, et retourne à l'invisible. Elle est une "insurrection" hors le Temps et l'Histoire, une tactique de la disparition.
Le terme s'est répandu dans les milieux internationaux de la "cyber-culture", au point de passer dans le langage courant, avec son lot obligé de méprises et de contresens.
La TAZ ne peut exister qu'en préservant un certain anonymat ; comme son auteur, Hakim Bey, dont les articles "apparaissent" ici et là, libres de droits, sous forme de livre ou sur le Net, mouvants, contradictoires, mais pointant toujours quelques routes pour les caravanes de la pensée.
L'utopie sociale naît d'une insatisfaction collective.
L'utopie réalisable, c'est la réponse collective à cette insatisfaction. mais comment répondre collectivement à une insatisfaction ? et quelles limites une collectivité doit-elle respecter pour satisfaire à son utopie réalisée ? telles sont les questions soulevées - avec une grande précision et quelques dessins au trait - par le livre de yona friedman, paru pour la première fois en 1974, et revu et augmenté pour cette édition.
Le flâneur des deux rives est l'un des derniers écrits d'Apollinaire, paru posthume en 1919. Commandé par Cendrars et Cocteau, le livre est un montage réalisé par Apollinaire à partir de chroniques parues dans le Mercure de France, augmentées de parties inédites. Flâneries parisiennes, au hasard de rencontres, hésitant entre le rêve et la réalité on y découvre Ernest La Jeunesse, Ferragute Cypriate, l'hôtel des Haricots, le Musée des réverbères, etc. et ce basculement permanent entre rêve et réalité donne à ce texte une tonalité merveilleuse qui en fait un chef d'oeuvre de la littérature sur Paris. Cahier hors texte couleur avec des pages du manuscrit et suivi d'une note des éditeurs, Patricia Farazzi et Michel Valensi.
La découverte de l'oeuvre de Benjamin fut, pour Michael Löwy, une émotion qui a ébranlé bien des convictions et dont l'onde de choc s'est ressentie pendant plus de 40 ans dans toute sa recherche sur les formes hétérodoxes du marxisme en Europe ou en Amérique latine. À la vision marxiste d'une révolution comme «locomotive de l'histoire», roulant inexorablement vers le «progrès», Benjamin propose une version de la révolution «comme frein d'urgence», annonçant une critique du progrès et de la croissance, qui se développera plus tard dans la pensée critique. Les 9 essais rassemblés ici se concentrent sur la dimension révolutionnaire de l'oeuvre de Benjamin, où s'imbriquent une approche inspirée d'un matérialisme historique non orthodoxe et des conceptions issues du messianisme juif.
La Horde d'or est un ouvrage de grande ampleur qui relève à la fois du livre d'histoire, de la compilation de documents, du témoignage à la première personne. Il associe analyse, documentation et écriture. Il fait partie de ces ouvrages "trans-genres" (pour reprendre une terminologie en usage dans d'autres domaines), qui apporte une information de première main et de première importance sur un moment crucial de l'histoire politique italienne, mais également européenne. Outre les deux rédacteurs principaux, l'un écrivain, l'autre libraire (décédé en 1998), de nombreux auteurs italiens ont participé à l'ouvrage, signant des contributions souvent importantes. On peut citer : Paolo Virno, Umberto Eco, Antonio Negri, Raniero Panzieri, Sergio Bologna, Oreste Scalzone, ou même ... Giorgio Amendola.
À ce jour, c'est encore l'unique ouvrage disponible sur l'ensemble des conflits sociaux en Italie entre 1968 et 1977. Le seul livre qui traverse l'ensemble des composantes de ce mouvement souvent ignoré, parfois mythifié. Sans doute, la formule « années de plomb » a-t-elle joué un rôle important dans cet effacement, puisqu'elle prétend encore en résumer la teneur et l'avenir. Elle marque surtout un manque d'histoire sur le « long mai» italien, et c'est à ce manque d'histoire que Primo Moroni et Nanni Balestrini ont voulu explicitement répondre, et à quoi s'est attelé un collectif d'auteurs, afin de raconter à nouveau, et livrer un panorama à la fois large et précis de ce qu'ils ont appelé, la « grande vague révolutionnaire et créative, politique et existentielle» de l'Italie entre 1968 et 1977.
Outre des analyses et des contributions de témoins et de lecteurs de cette « grande vague », le livre réunit un ensemble de documents considérables, soigneusement choisis et dont un grand nombre serait tombé dans l'oubli sans le soin particulier d'archiviste qui caractérisa Primo Moroni, à l'initiative de l'ouvrage, dont la librairie ouverte à Milan en 1971 devint vite un repère incontournable pour l'ensemble de la gauche italienne. À ce titre, on trouve dans La Horde d'or aussi bien des chansons que des tracts, des récits et des témoignages, des analyses, des communiqués, des appels ou des articles, tous publiés à l'époque et relatifs aux événements qui ébranlèrent la société italienne.
Les Thèses « Sur le concept d'histoire » de 1940 sont le dernier écrit de Walter Benjamin et constituent peut-être le document le plus significatif dans la pensée critique du XXe siècle. T exte allusif, sybillin, dont l'hermétisme est constellé d'images et d'allégories, semé de paradoxes, traversé d'intuitions. Ce livre en propose une étude au mot à mot. Là où d'autres ne voient que contradiction ou ambiguïté, il met en évidence une cohérence fondamentale, dont la clé est constituée par la fusion de trois discours hétérogènes: le romantisme allemand, le messianisme juif, le marxisme révolutionnaire. Echappant aux classifications dans lesquelles on a voulu le ranger, Benjamin est en cela un auteur qui dérange.
L'oeuvre cinématographique de Chantal Akerman (1950-2015) couvre presque un demi-siècle, depuis Saute ma ville (1968) jusqu'à No Home movie (2015) où elle se met en scène dans un dialogue d'une extraordinaire émotion avec sa propre mère, survivante d'Auschwitz, et dont elle a pu dire, en forme d'énigme, qu'elle était "le seul sujet de ses films". Cinquante ans d'un parcours paradoxal qui est une perpétuelle interrogation de ce que révèle le cinéma de notre regard sur le monde. L'essai de Corinne Rondeau insiste sur la dimension littéraire du "cinéma Akerman", sur son corps à corps avec la littérature et se veut aussi un hommage à un femme qui s'était livrée à une "guerre aux images avec les images", jusqu'à sa disparition tragique en 2015.
L'art à l'état vif a paru pour la première fois chez Minuit en 1991, proposant une nouvelle théorie esthétique pragmatique, où s'affirmait paradoxalement et avec force, aux côtés d'un poème de T S Eliot, des formes de l'art populaire, comme le rap, le graph ou le funk. Le livre fit grand bruit et permit de faire se rencontrer des esthétiques qu'on aurait pu croire étrangères, qui se retrouvaient en fait dans la pratique artistique. Le corps prenait également une place centrale dans ce livre de Shusterman, annonçant ce qui allait devenir le thème de son oeuvre à venir : la somaesthétique, qu'il a développée ensuite dans plusieurs ouvrages dont Conscience du corps (L'éclat, 2007). 25 ans plus tard, le livre reparaît en poche, enrichi d'une nouvelle préface qui fait état du chemin parcouru.
L'oeuvre et la vie du peintre florentin Paolo Uccello (1397-1475) sont aussi intimement imbriquées que les jambes des chevaux et des hommes dans ses célèbres tableaux de bataille, et Giorgio Vasari lui consacre déjà une « vie imaginaire » qui servira de modèle à celle de Marcel Schwob (1896), laquelle inspirera ensuite deux textes à Antonin Artaud. Nous avons rassemblé ici ces trois vies d'Uccello, par Vasari, Schwob et Artaud, qui ponctuent la destinée de ce peintre hors du commun. Elles font revivre sous nos yeux ce moment secret de la création artistique qui échappe aux études d'histoire de l'art et qui ne se montre qu'à l'imagination créatrice la plus inspirée.
La parution du Monde des non-A de Van Vogt, en 1945, traduit en français par Boris Vian a éveillé l'intérêt d'un grand nombre de personnes pour la Sémantique générale.
Cette discipline se fonde sur un système non-aristotélicien formulé par Alfred Korzybski (1879-1950) selon lequel il est possible qu'une chose à la fois soit ET ne soit pas. Ainsi la porte était ouverte à une exploration du monde aux horizons insoupçonnés. En 1997, L'éclat faisaient paraître pour la première fois en français une anthologie d'écrits de Korzybski, permettant de ne plus évaluer le vaste 'territoire' de la Sémantique générale à l'aune des seules 'cartes', quelquefois approximatives, qu'en ont dressées des auteurs comme A.E.
Van Vogt, mais aussi Bateson, Bachelard, Laborit ou même ... Michel Houellebecq!
Les quatre livres rassemblés sous le titre Philosophie infinitive sont l'aboutissement de plus de vingt années de recherche sur la langue infinitive et sur les possibilités qu'elle offre à notre manière de voir le monde.
1. Penser à être, pour le verbe être et le verbe dire, 2. Penser à croire, pour croire et pour vouloir et pouvoir, 3. Penser à penser, pour ce verbe et pour se libérer, et 4.
Penser à vivre, pour vivre et pour souffrir et aimer, où passent et repassent un peu plus de 1 700 verbes et quelques poignées de conjonctions et de prépositions. Ainsi, la somme des 1700 actions à la puissance 1700, combinées possibles de cette humaine comédie des verbes ouvre des perspectives de pensée infinies pour la philosophie.
On connaît, par le volume de Gershom Scholem Walter Benjamin. Histoire d'une amitié, les liens qui unissaient les deux hommes. Ils ont échangé entre 1932 et 1940 une correspondance qui mérite pleinement le terme d'oeuvre, comme si dans cet échange au quotidien, dans cette absolue confiance et confidence l'un par rapport à l'autre, et autrement que dans une oeuvre 'publique', ils s'étaient livrés à une analyse en profondeur d'un siècle bouleversé : vie littéraire et philosophique, montée du nazisme en Allemagne, errance de Benjamin, permanence de Scholem en Palestine dès 1923, où il oeuvre à une symbiose entre les populations juives et arabes... autant de sujets abordés au fil des lettres et qui confirment la pertinence d'analyse dans l'échange et la discussion parfois polémique des deux hommes.
Robert Musil (1880-1942) a fait, sur le calcul des probabilités et les applications à la fois prometteuses et hasardeuses que l'on était tenté depuis longtemps d'en faire à l'étude des phénomènes moraux, sociaux et politiques, des lectures détaillées et approfondies dont on trouve des traces nombreuses et importantes dans L'Homme sans qualités.
Le triomphe du mode de pensée statistique et l'avènement de ce qu'on pourrait appeler " l'homme statistique ", qui tendent à rendre les individus, les idées et les événements presque complètement interchangeables et à peu près indifférents pour ce qui est du résultat global que l'on peut escompter, constituent un aspect essentiel de la difficulté qu'éprouve l'homme d'aujourd'hui à se percevoir encore comme une personne privée et de la crise que traverse l'individualisme de type traditionnel, dont Musil pense que la phase héroïque est en train de s'achever.
Il n'est pas exagéré de dire que le possible et le probable constituent les deux notions centrales autour desquelles Musil a ordonné sa philosophie du devenir de l'humanité et sa conception de l'histoire. La tâche de l'écrivain et de l'artiste, tels qu'il les conçoit, est de faire surgir de nouvelles possibilités ; mais ils doivent savoir en même temps que ce qui se réalise est finalement toujours le plus probable, ce qui explique l'impression que donne l'histoire de se répéter toujours de la même façon et de suivre un chemin qui ne mène à aucune destination et ne correspond à aucun progrès qui nous en rapproche de façon perceptible.
Puisque l'histoire humaine n'est pas, selon Musil, celle du génie, mais celle de l'homme moyen, la question qui se pose à l'écrivain est de savoir comment il peut espérer se faire comprendre de la moyenne et transformer la fatalité apparente que représentent le retour inévitable du système qu'il s'efforce de transformer à un état moyen et le rétablissement assuré du règne de la moyenne en une chance authentique pour l'humanité.
Le livre rappelle que les enjeux urbains de la pensée de Walter Benjamin ne se situent pas en un lieu unique, mais avant tout dans un entre-deux villes où s'est joué le sort d'une modernité contradictoire : entre Paris, capitale du XIXe siècle et Berlin, capitale du XXe ou, pour le dire autrement, entre la grande ville et la métropole. Il met ainsi en évidence les deux versants de l'analyse urbaine et architecturale dans l'oeuvre de Walter Benjamin : l'un, centré sur Paris et l'archéologie de la modernité ; l'autre sur Berlin, plus attentif à l'émergence de la métropole et de l'architecture modernes. Les essais s'articulent autour de quatre chapitres (I. Paris : un lieu de résistance. II. Berlin, entre deux siècles. III. La ville sans aura. IV. L'impossible habitat.)
Depuis quelques années, avec le développement de la neuroscience, de la neuroimagerie, la neuropsychologie, on accorde une place toujours plus grande au cerveau, qui régenterait non seulement notre pensée, mais aussi nos émotions, nos doutes, nos amours, etc., au point que ce n'est plus tant l'humain qui pense, est ému, doute, aime etc., mais la « matière cérébrale », promue au rang d'ordonnatrice de nos vies et de nos espérances. La médecine neuroenthousiaste emboîte le pas et dresse une carte du cerveau qui ressemble de plus en plus à la carte du T endre d'une Melle de Scudéry devenue neurologienne. Après Creuser la cervelle, E. Fournier dresse un réquisitoire sans appel contre ce nouvel ordre cérébral qui nous prépare un monde d'écervelés à la merci des Pères Ubu de la neuroquelquechose.
Cet ouvrage regroupe pour la première fois ce qui a été retrouvé de la correspondance échangée de 1916 à 1937 entre Paul Engelmann (de même que quelques proches) et Ludwig Wittgenstein. Ces lettres permettent de mieux comprendre la participation de Wittgenstein à la Première Guerre mondiale, de suivre la genèse du Tractatus logico-philosophicus et de saisir les transformations de la pensée de Wittgenstein au cours de ces années difficiles, qui ont vu l'effondrement de l'Empire austro-hongrois.
L'ouvrage contient aussi une version considérablement augmentée du «Mémoire» qu'Engelmann a consacré à Wittgenstein et qui a été publié en anglais en 1967. S'y ajoutent des textes d'Ilse Somavilla, Josef Schächter et Brian McGuinness, tous trois spécialistes de l'oeuvre de Wittgenstein. Il s'agit d'une édition critique, pourvue d'un très copieux apparat de notes et de commentaires.
À l'automne 2015, le gouvernement a annoncé que démarreraient au plus vite les travaux de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Il a martelé sa volonté d'expulser la zad de l'ensemble de ceux qui l'habitent et la cultive. Avec les efforts conjugués des tractopelles de Vinci et des grenades de la gendarmerie, il entend tenter, une fois encore, « dès que possible », de venir à bout de tout ce qui pousse et vit dans ce bocage.
C'est pourquoi nous avons voulu dès que possible faire paraître ce petit livre, éclaireur et annonciateur d'un livre à venir, pour appeler partout à défendre la zad et, à travers elle, tout l'espoir contagieux qu'elle contient dans une époque plombée.
La conviction qu'il est possible d'arrêter les projets destructeurs de ceux qui prétendent nous gouverner et de se libérer du joug de l'économie. L'aspiration à inventer ici et maintenant d'autres manières d'habiter le monde, pleines et partageuses. Cet espoir s'ancre dans une histoire commune, riche des élans de dizaines de milliers d'insoumis et de liens indéfectibles soudés par le temps. Cette brève nouvelle politique invoque quelques fragments décisifs de cette aventure, comme autant de conjurations face à la menace et de repères éclatants pour l'avenir.
La correspondance de Franz Kafka tient une place privilégiée dans son écriture, en ce qu'elle révèle l'extraordinaire complexité d'un homme aux prises avec une oeuvre, la sienne!, qui semble se tenir à ses côtés sans qu'il puisse la saisir et s'en rendre pleinement maître. Le choix de lettres établi, traduit et présenté par Claude le Manchec témoigne de cette « sorcellerie épistolaire », qui s'empare de lui quand il s'adresse au monde, et qui révèle l'extraordinaire humour en demi-teinte de ce génie mis à la torture. Il ne prétend, sous cette forme, qu'à être une incitation à pénétrer plus profondément au coeur de l'oeuvre la plus énigmatique du XXe siècle, à travers les plus belles lettres adressées à ses amis, sa famille ou ses fiancées successives.
Les musiciens de la seconde moitié du XXe siècle, de John Cage à Richie Hawtin, en passant par les minimalistes américains, le free jazz et quelques inclassables et visionnaires, savent ce qu'ils doivent à l'écoute créatrice et généreuse de Daniel Caux.
Passeur de sons, caravanier des musiques nomades, il a porté jusqu'à nos oreilles la conque de ses découvertes enthousiastes. Toute son action, depuis la fin des années 60, aura consisté à faire connaître et entendre celles et ceux qui dessinent aujourd'hui notre paysage musical. Son écriture, toujours juste et précise, a accompagné au jour le jour cette aventure musicale: articles, textes de pochette de disques, programmes, émissions sur France Culture et France Musique, les textes rassemblés ici sont une histoire vivante du siècle sonore, mise en musique par les musiciens mêmes.
Qu'est-ce qui survit du texte original dans une traduction ? À travers la question de la « mémoire » du texte, de son « aura », Walter Benjamin, lecteur et traducteur de Marcel Proust, s'est longtemps interrogé sur les relations entre une oeuvre originale et sa « reproduction », dont la traduction fait partie. Cette interrogation prend tout son sens à l'épreuve de l'oeuvre de Proust, tout entière baignée dans la problématique de la mémoire. Dans sa concision, l'essai de Daniel Wiedner établit un nouveau pont entre deux oeuvres, 'disparates', mais parmi les plus bouleversantes du XXe siècle.
Avec l'apparition du numérique, les 'créations' se détachent lentement de leurs supports matériels.
Images, musique, mots et algorithmes sillonnent la planète jour et nuit, devant les yeux écarquillés des marchands. L'exode du savoir conduit à une terre promise à bien des bouleversements. Tandis que des armées de juristes s'interrogent sur la manière de pouvoir "vendre les idées", une rumeur s'élève, laissant entendre qu'elles pourraient être "libres comme l'air, libres comme l'eau, libres comme la connaissance".
Des logiciels libres au MP3, du droit de citation au plagiat considéré comme un des beaux-arts, Richard Stallman, Bruce Sterling, John P. Barlow, Richard Barbrook, Ram Samudrala, Philippe Quéau, Bernard Lang, Eric S. Raymond, Benjamin Drieu, Michael Stutz, Jean-Michel Cornu, Critical Art Ensemble, Negativland, Antoine Moreau et Michel Valensi dessinent les contours de la communauté paradoxale du " Libre ".
Peut-on restaurer la nature comme on restaure un monument ? Dans un contexte d'urgence environnementale, surgissent ainsi des lieux hybrides : forêts reconstruites, écosystèmes reconstitués, zones "naturelles" protégées, alimentant le mythe d'une nature retrouvée. Du fait de cette double appartenance, ils témoignent, pour une conception étroite de l'écologie, d'un accroissement de la mainmise de la technique humaine sur l'environnement.
Mais à ce mythe d'une nature intacte, le livre oppose un point de vue fondé non plus sur un absolu de nature, mais sur l'idée d'un soin responsable apporté par l'homme. S'impose alors le concept d'artefact naturel (comment définir un nid d'oiseau fabriqué par un humain, par exemple ?), qui ouvre des perspectives inédites pour la philosophie de l'environnement.