Cet ouvrage, paru en 1922 sous le nom de Pessoa, est un véritable brûlot, aussi explosif, détonant et jubilatoire aujourd'hui que lors de sa publication. Ce texte court reste l'unique oeuvre de fiction publiée du vivant de l'auteur. Au terme du repas, un banquier démontre à ses convives que ses convictions et ses actions en matière d'anarchisme n'ont rien à envier à celles des poseurs de bombes. Il déploie ainsi les trésors d'une rhétorique insidieuse au service de sa personne et s'installe dans de provocants paradoxes.
Si ce banquier anarchiste nous enchante avec ses raisonnements par l'absurde et une mauvaise foi réjouissante, il s'agit surtout d'un pamphlet incendiaire contre la " société bourgeoise " (autrement dit : la nôtre), ses hypocrisies et ses mensonges. C'est aussi une dénonciation du pouvoir de l'argent, qui mine de l'intérieur le bien le plus précieux de l'homme : la liberté.
Dans Le style Camp, Sontag tente de définir l'indéfinissable.
Le Camp, c'est une façon de voir le monde autant qu'une manière d'être. Cet art de valoriser l'artifice pourrait avoir pris corps selon Sontag pour la première fois dans Les Fourberies de Scapin, de Molière, en 1671, et autour de la figure de Louis XIV. La beauté androgyne de Greta Garbo, le film King Kong de 1933, ou encore Mozart, incarnent tous la sensibilité Camp - un mélange d'extravagance, de ludisme et de sérieux. Le Camp, en tant que subversion des normes sexuelles, est aussi une forme d'expression et un regard propre aux communautés queer.
Dans Culture et sensibilité d'aujourd'hui, Susan Sontag va plus loin encore. En théorisant notre « nouvelle sensibilité », elle suggère qu'il n'est plus possible de différencier l'art noble et l'art populaire et redéfinit la nouvelle fonction de l'art depuis la révolution industrielle. Emblématique d'une époque et de ses mouvances contestataires, ce second essai est une véritable déclaration d'indépendance par rapport à la critique traditionnelle : c'est l'un des textes critiques les plus lus et les plus influents des années 1960.
Publié à l'origine en 1964 et inclus dans son premier recueil d'essais emblématique, Against Interpretation, Le style Camp et Culture et sensibilité d'aujourd'hui ont été les premiers essais critiques à abolir les frontières entre la « haute » et la « basse » culture ; ils ont propulsé la carrière de Susan Sontag dans les années 1960. Ces essais ont initié une nouvelle façon de penser, ouvrant la voie à un tout nouveau style de critique culturelle.
Le héros de Queer s'appelle Lee, comme le personnage de Junkie (le premier roman de Burroughs, qu'il avait à l'origine précisément signé du pseudonyme de William Lee). Le caractère autobiographique de ce texte est donc confirmé, d'autant plus que Burroughs rappelle dans sa préface qu'il a passé la fin des années 40 à Mexico, comme son héros. Comme d'habitude cependant chez Burroughs, la fantaisie phagocyte la réalité. Queer est en effet le récit halluciné d'une errance, d'un mal de vivre incurable qui a pour toile de fond un Mexique couleur de cauchemar, avec son soleil obsédant, ses étendues de tôles ondulées et toute une faune pittoresque et violente... Lee, héros désenchanté, erre de bar en bar, noyant son désespoir dans l'alcool, dans la drague, à la fois avide et indifférent, spectre sur qui on sent en permanence peser la menace d'une dissolution. Son seul repère : Allerton, jeune homme indolent jaloux de son indépendance, mais aussi secrètement flatté d'être l'objet de la convoitise de Lee. A force de séduction, de prévenance et de ténacité, Lee parviendra à ses fins et accompagnera ensuite son compagnon dans une étrange expédition à travers l'Amérique du Sud à la recherche d'une mystérieuse drogue, le Yage, connue pour ses pouvoirs télépathiques. Queer est essentiellement une peinture du manque, le récit d'une douloureuse tentative de sevrage. Par delà son exotisme sulfureux, ce roman est la remarquable radiographie d'une détresse sans autre recours que l'écriture. Né à Saint-Louis en 1914, mort en 1997 à 83 ans. A la fin de ses études, il émigre à New York, plonge sciemment dans le monde de la pègre et devient intentionnellement héroïnomane. Parallèlement, à l'université de Columbia, il fait la connaissance de Ginsberg et de Kerouac.
Vers 1950, Burroughs commence à écrire. Il tue sa femme accidentellement dans un exercice à la Guillaume Tell raté et s'éclipse en Amérique du Sud. En 1954, il s'installe à Tanger qu'il ne quittera qu'en 1964. Ses intoxications se font de plus en plus aigües. Après sa désintoxication entreprise à Londres, il se remet à l'écriture. C'est en 1975 que Burroughs est reparti vivre à New York, où il est devenu une des " stars " de la " scène new-yorkaise ". Gourou de la Beat Generation, éminence grise controversée de l'avant-garde internationale, prophète sombre à l'humour des plus noirs, William Burroughs a eu une influence avec laquelle peu d'écrivains vivants ont rivalisé. Cette édition de Queer au format de poche coïncide avec le 25è anniversaire de la première publication de ce titre aux Etats-Unis. " J'avais donc écrit Junkie dans une intention assez évidente : relater en termes très précis et aussi clairs que possible mon expérience de la drogue. J'escomptais être publié, reconnu et bientôt riche.
Kerouac venait de publier The Town and The City, quand je commençai à écrire Junkie. Je me souviens d'ailleurs de lui avoir écrit, sitôt son bouquin sorti, que désormais, la gloire et la richesse lui étaient acquises. Comme on le voit à l'époque, je ne connaissais rien au métier d'écrivain. Les motivations qui me poussèrent à écrire Queer étaient plus complexes et viennent seulement de m'apparaître. Pourquoi vouloir relater avec tant de minutie des souvenirs aussi pénibles, aussi déplaisants, aussi déchirants ? Si j'ai bel et bien écrit Junkie, j'ai l'impression que mon existence se trouve transcrite dans Queer.
J'ai également pris grand soin de m'assurer les moyens de continuer à écrire, histoire de mettre les choses au net... l'écriture peut fonctionner comme vaccination préventive... " W.S.Burroughs. Février 1985
En octobre 1974 Georges Perec s'est installé pendant trois jours consécutifs place Saint-Sulpice à Paris. A différents moments de la journée, il a noté ce qu'il voyait : les événements ordinaires de la rue, les gens, véhicules, animaux, nuages et le passage du temps. Des listes. Les faits insignifiants de la vie quotidienne. Rien, ou presque rien. Mais un regard, une perception humaine, unique, vibrante, impressionniste, variable, comme celle de Monet devant la cathédrale de Rouen. Les mille petits détails inaperçus qui font la vie d'une grande cité - d'un quartier dans une grande cité. Les innombrables variations imperceptibles du temps, de la lumière, du décor, du vivant. Autobus, chiens, passants, touristes. " Ce qui se passe quand il ne se passe rien, sinon du temps, des gens, des voitures et des nuages. " Ce texte magistral dans l'oeuvre de Perec figure à présent au rang des classiques.
« Tout a débuté par un essai, consacré à quelques uns des problèmes esthétiques, et moraux, que pose l'omniprésence des images photographiques : mais plus je réfléchissais à la nature des photographies, plus elles devenaient complexes et suggestives. Si bien qu'un essai en engendra un autre, qui à son tour (à mon grand étonnement), en engendra un troisième, et ainsi de suite, chacun ajoutant un maillon à une chaîne d'essais sur le sens et la vie des photographies, jusqu'à ce que je fusse allée assez loin pour que le développement esquissé dans le premier essai, étayé puis prolongé dans les suivants, pût être récapitulé et généralisé de façon plus théorique. Et trouver son terme. [.] Ecrire sur la photographie, c'est écrire sur le monde. Et ces essais sont en fait une méditation prolongée sur la nature de notre modernité. » (Susan Sontag) Paru pour la première fois en 1977, Sur la photographie est devenu un livre culte sur le sujet.
La Vengeance de la pelouse, publié en 1983, rassemble 62 courts textes, entre la nouvelle et le flash, écrits de 1962 à 1970. Ces brèves proses apportent un éclairage sur la jeunesse de Richard Brautigan - dont on sait peu de choses - marqué par le regard mélancolique qui est le sien, par les souvenirs d'enfance, les réminiscences d'un âge innocent.
Le monde de l'auteur est peuplé d'antihéros maladroits, d'oncles menteurs, d'après-midi de chasse en Oregon, de méditations au bord de la rivière Long Tom, de parties de chasse qui virent au tragique ou d'adolescents qui menacent de devenir de « dangereux criminels » s'ils n'obtiennent pas une nouvelle télé... C'est l'Amérique du drame privé, de la catastrophe ordinaire que Richard Brautigan conte à travers ces récits très personnels et teintés d'humour.
Le livre présente également la période californienne de la vie de l'auteur - en parallèle avec la montée de la Beat Generation dont il sera une figure étrange et excentrique - et surtout le poumon de survie que sera pour lui l'océan pacifique. Il se moque du milieu littéraire de l'époque, rit des médias et des habitudes de surconsommation.
Ces textes inclassables, qui allient naturellement le malheur et la blague, font de lui un maître du texte court et l'auteur de quelques-uns des récits les plus surprenants de la littérature américaine contemporaine.
En 1978, à partir de métaphores suscitées par le cancer, Susan Sontag analyse aussi bien les sources médicales et psychiatriques que les textes littéraires de l'Antiquité aux temps modernes, de Keats Dickens, Baudelaire, James Mann, Joyce, Mansfield et Auden.
Elle démystifie les fantasmes idéologiques qui démonisent certaines maladies et, par extension, culpabilisent les malades. Dans un second essai, écrit dix ans plus tard, Susan Sontag souligne à quel point le sida a réactivé le spectre de l'épidémie dont le monde moderne se croyait débarrassé. Certains en font la " peste " de notre temps, le châtiment infligé par Dieu aux groupes "déviants ". Susan Sontag dénonce ce catastrophisme et propose une réflexion extraordinaire d'intelligence et de culture historique, littéraire, philosophique, sur la propension qu'a l'homme.
Après avoir achevé Le Festin nu, William Burroughs s'est lancé dans une longue période expérimentale.
Dans la petite chambre du Beat Hotel de la rue Gît-le-Coeur, où il s'est installé, naît le projet d'une oeuvre ambitieuse et risquée qui prend la forme d'un triptyque : La Machine molle, qui paraît en 1961, Le Ticket qui explosa, écrit cette même année, et Nova Express, écrit en 1964. "Je tente de créer une mythologie nouvelle pour l'ère spatiale. Je sens que les vieilles mythologies sont définitivement brisées et ne sont pas adaptées au temps présent", disait Burroughs au sujet de cette trilogie.
Norman Mailer y voyait "un Enfer qui peut-être nous attend, produit final et apogée de la révolution scientifique". Comme Dante et Milton, Burroughs s'est employé à représenter la position de l'homme dans l'univers - une position intenable, déchirante et absurde.
« Toni Morrison donna à l'université de Harvard une série de conférences sur le roman américain qui sont à l'origine de Playing in the dark. Elle analyse le rôle attribué au personnage noir, et la place qui lui est réservée dans les oeuvres de Melville, Twain, Willa Cather, Poe, Hemingway., écrites pour des lecteurs à peu près toujours identifiés à des Blancs. Toni Morrison apporte un éclairage nouveau et très personnel sur la fiction américaine, et, plus généralement, sur la manière dont s'est constituée l'identité blanche américaine au fil de l'histoire littéraire.
« Qu'arrive-t-il à l'imagination textuelle d'un auteur noir, qui reste à un certain niveau toujours conscient de représenter sa propre race devant, ou malgré, une race de lecteurs qui se pense comme « universelle » ou sans race ? » demande-t-elle. » (Nicole Zand, Le Monde)
Toni Morrison sera la grande invité du Louvre pour le mois de novembre. L'Américaine, prix Nobel de
littérature assurera la programmation de l'auditorium. Le livre servira de support à l'événement. Il
comportera un texte de Toni Morrison, sur le thème « Etranger chez soi », à partir du tableau de
Géricault, Le Radeau de la méduse, trois textes des conservateurs du département des Antiquités
Grecques, Etrusques et Romaines ainsi que trois textes de slameurs qui interviendront dans la grande
galerie.
Ce volume rassemble la plupart des textes autobiographiques de Walter Benjamin. De 1906 à sa mort, Benjamin, sans avoir, semble-t-il, tenu régulièrement de journal, obéit à sa propre injonction : " Ne laisse passer aucune pensée incognito, et tiens ton carnet de notes avec autant de rigueur que les autorités tiennent les registres des étrangers. " Ce registre, Benjamin l'ouvre à l'occasion de voyages (Italie), d'une rencontre importante (Brecht) ou lorsque affluent les souvenirs d'enfance : c'est alors la Chronique berlinoise, d'autant plus précieuse qu'elle n'est rythmée que par l'épiphanie du souvenir. On sait que Benjamin proscrivait le " je " de ses textes ; s'il semble déroger à cette règle ici, c'est au moyen de la note, où celui qui écrit se tait pour laisser parler les choses et fixer les idées au moment où elles surgissent. Ces textes, souvent fragmentaires, témoignent par leur diversité de la cohérence d'une pensée ; ils ne livrent pas seulement les matériaux infatigablement recherchés des chantiers à venir, ils donnent à lire le parcours d'une vie où les crises personnelles font souvent entendre leur écho.
" Pédagogue, homme de lettres, moraliste, philosophe de la culture, connaisseur des idées fortes, mémorialiste protéen de sa propre vie...
Parmi toutes les notabilités intellectuelles qui sont apparues en France depuis la Deuxième Guerre mondiale, Roland Barthes est celui dont l'oeuvre est, j'en suis persuadée, la plus sûre de durer. C'est Barthes l'écrivain qui est my subject et à travers Barthes' accomplishment as a writer (promeneur solitaire dans la grand tradition, et un écrivain plus immense encore que ses plus fervents admirateurs ne le prétendent), je tiens à déchiffrer quelques procédés fondamentaux de modernité littéraire et de vision esthétique du monde.
"
La question d'Adorno « la poésie, après Auschwitz, est-elle encore possible ? » était également, bien que sur un autre mode, la question même de Paul Celan. Celle qui, aggravant la poésie, ne cessait de la rendre plus difficile. C'est parce qu'il portait en lui une telle question que Celan, en 1967, accepta de rencontrer Heidegger avec l'intention de lui demander - à lui, le penseur de la poésie mais aussi le penseur de cet âge du monde qui est le nôtre, de s'expliquer sur son attitude dans les premiers temps du national-socialisme et, surtout, de sortir du silence obstiné qu'il avait observé depuis la fin de la guerre sur Auschwitz : sur l'extermination, cet « évènement sans réponse » comme dit Blanchot. Heidegger ne dit pas un mot. Fit comme s'il ne comprenait pas. Sur le fond de cet épisode, emblématique, ce livre essaie de s'interroger sur la tâche aujourd'hui, et la destination de la poésie.
La Quatrième prose est, après Le sceau égyptien, Le bruit du temps et Voyage en Arménie, le dernier
des grands textes en prose de Mandelstam a voir le jour en français. Déjà publié à un petit tirage très
vite épuisé, nous avons demandé à André Markowicz d'en donner une version entièrement nouvelle,
complétée par un dossier comprenant d'autres textes liés à la problématique de La Quatrième prose.
Ce livre constitue la réplique virulente de Mandelstam à une accusation de plagiat dont il a été victime. A
travers Arkadi Gornfeld, son accusateur, c'est l'ensemble du monde corrompu de l'establishment
littéraire stalinien qui est visé. Cri de haine contre les littérateurs, ces pages permettent également à
Mandelstam d'exprimer ses convictions les plus profondes sur la nature de son travail. Comme toujours
chez lui, le point de départ anecdotique et polémique de ces textes où il exprime ses convictions les plus
profondes sur la nature du travail littéraire est dépassé, corrigé par l'imprévisibilité d'un style
virevoltant.
Ce volume prend sa place naturelle après Trois pièces radiophoniques déjà parues dans la même collection. Il regroupe en effet les émissions destinées à la jeunesse réalisées par Benjamin avant la main-mise des nazis sur la radio.
Ici, Benjamin cherche à renouveler le conte. " Comment ? Par des récits qui semblent inspirés de Baudelaire et de Kafka, des récits qui associent curieusement l'escroquerie et la catastrophe et qui, comme en passant, traduisent la vision benjaminienne de l'Histoire comme une catastrophe continue. De qui est-il question ? De brigands et de charlatans, de sorcières au bûcher, d'escrocs, d'imposteurs, de marginaux, de personnages suspects comme Cagliostro ou Faust, de bootleggers de la Prohibition, et même d'un faux messie blasphémateur, le fameux Sabbataï Zevi dont Benjamin a découvert l'existence grâce à son ami Gershom Scholem. Autant de personnages qui cherchent à survivre dans un contexte général de catastrophe : le tremblement de terre de Lisbonne, les inondations du Mississippi, la destruction de Pompéi, etc. Les contes pour enfants de Benjamin ne sont pas des contes de fée, ils adressent plutôt un avertissement aux jeunes gens, un avertissement prophétique [...]. En cela, ces contes de la catastrophe imminente demeurent fidèles à la vocation des contes traditionnels qui, dans l'esprit de Benjamin et d'Ernst Bloch, doivent aussi être des récits d'émancipation, animés malgré tout par un principe d'espérance, ô combien fugitif, à l'opposé des mythes asservissants. " (Jean Lacoste, La Quinzaine littéraire) Que Benjamin ait été aussi un conteur, on le savait déjà. Mais ici, à travers les prismes de l'enfance et la profusion labyrinthique de récits hantés par le merveilleux, c'est le projet d'une pédagogie libre qui s'énonce familièrement, à la façon des devinettes. Tant dans le " je me souviens " berlinois qui ponctue le livre que dans l'évocation d'évènements lointains, ces " lumières " pour enfants clignotent pour tous comme le butin enjoué de ce collectionneur d'histoires qu'était Benjamin.
Le langage, le rythme, les choses, l'invention, la clarté, la voix: tels sont les titres des six brefs
chapitres de ce livre bref. Livre de philosophie, mais sans références, sans citations, sans
guillemets, sans italique. Énoncé de phrases qui cherchent, en se succédant à la façon des tuiles
d'un toit, à couvrir la question de la phrase et, à travers elle, à ouvrir celle du penser. Chercher
une phrase, c'est l'équivalent à la fois libre et exigeant de "penser". Comment et avec quoi penset-
on ? Telle est la question ici posée, question qui soutient, par sa forme même, que la littérature
est la réponse: les phrases nouvelles pressenties puis formées.
L'auteur
Pierre Alféri a fondé la revue 'Détail' avec Suzanne Doppelt et est également co -fondateur de 'La
revue littéraire générale' avec Olivier Cadiot. Il a été pensionnaire de l'Académie de France à Rome
entre 1987 et 1988 et 'écrivain résident' de la Fondation Royaumont entre 1991 et 1992. Il a écrit
une dizaine de romans, poèmes et essais qui combinent ses différentes qualités d'écrivain, poète et
philosophe. Lauréat du festival Poem (mars 2003) dans la catégorie court de création, pour son
court-métrage Tante Elisabeth, il a également réalisé des travaux communs avec le plasticien
Jacques Julien ainsi que des disques et des performances avec le musicien Rodolphe Burger (Kat
Onoma). Pierre Alféri a par ailleurs traduit plusieurs poètes anglo -saxons contemporains, John
Donne, Giorgio Agamben et Meyer Schapiro.
« Nous nous connaissons depuis 1945, nous vécûmes ensemble pendant quelques mois en 1953 dans l'idyllique Lower East Side d'avant la guerre du Vietnam entre les avenues B & C dans la 7è Rue Est, que connurent Kerouac, Corso et d'autres amis, où nous avons assemblé le texte des Lettres du Yagé et de Queer et nous avons eu une affaire de coeur. », confie Allen Ginsberg dans sa préface.
De Rome en décembre 1953 à Copenhague en août 1957, le futur auteur du Festin nu écrit à l'auteur de Howl des lettres qui sont des fictions minuscules. Ce n'est pas seulement l'esprit de cet écrivain cosmopolite, dont l'existence est aussi picaresque que ses oeuvres, qui nous est révélée par ces lettres, mais aussi un authentique journal de bord de son écriture.
« Je décidai d'écrire un livre sur l'Amérique et les grandes figures qui avaient fait son histoire,
choisissant pour chaque personnage un style en prose approprié, et n'utilisant que des documents
originaux ». William Carlos Williams.
Si William Carlos Williams est devenu l'un des écrivains les plus célébrés de la littérature
contemporaine américaine, il demeure largement méconnu en Europe et principalement en France.
Pourtant l'oeuvre de Williams est aussi riche que prolifique ; elle compte d'importants recueils de
poésie, des romans, des nouvelles, des pièces de théâtre, des essais sur l'écriture, sur la peinture,
la sculpture, le sens et la portée de la culture américaine, des traductions. Reconnu par Ezra
Pound, admiré par Marianne Moore, Louis Zukofsky, Robert Lowell, Wallas Stevens, Kenneth
Rexroth, il trouve en Allen Ginsberg un disciple tumultueux.
Au grain d'Amérique fonde la spécificité d'une Amérique textuelle qui cesse d'être une immense et
sauvage Nouvelle-Angleterre pour s'affirmer comme la terre d'un grand projet historique.
L'hymne ne désigne pas dans ce livre une forme poétique particulière mais l'ensemble des dispositifs que la modernité a dû abandonner pour se tendre. Le mouvement des essais qui le composent est celui d'une généalogie, moins au sens d'une perspective proprement historique qu'à celui d'une récapitulation faisant la part au caractère dispersé des indices. Les noms qui jalonnent cette recherche - Hölderlin, Büchner, Baudelaire, Leopardi, Stendhal ou, plus près de nous, Benjamin et Mandelstam - définissent le réseau de sens où ces indices prennent consistance en se relançant les uns les autres.
La Fin de l'hymne a précédemment paru dans la collection « Détroits » en 1991.
Quand Virginia Woolf déambulait sur les quais de la Tamise, dans les boutiques d'Oxford Street ou dans la maison de Dickens, elle aurait pu donner des leçons aux adeptes du " nouveau journalisme ", qui n'a jamais été que celui du talent et de l'écriture. Publiés en 1931-1932 dans Good Housekeeping, ces cinq articles ont été réunis pour la première fois aux Etats-Unis en 1975 par Frank Allman et édités en Angleterre par Hogarth Press en 1982 pour le centenaire de la naissance de Virginia Woolf. Le sixième chapitre, paru en décembre 1932 dans Good Housekeeping, ne figurait pas dans les éditions américaine et anglaise de The London Scene et a fait l'objet d'une publication inédite par Christian Bourgois en 1984.
En janvier 1953, William Burroughs entreprit une expédition de sept mois dans les jungles d'Amérique du Sud pour y trouver du yage, légendaire plante hallucinogène de l'Amazone. Au-delà d'une étude anthropologique, il en profite pour balayer de son regard satirique les régimes politiques locaux. A partir de ses carnets et des lettres qu'il envoie à Allen Ginsberg, Burroughs compose un récit qui fut dans un premier temps publié dans des magazines. Dans cette nouvelle édition, le professeur Oliver Harris est retourné aux manuscrits d'origine afin de raconter la surprenante genèse du texte et d'établir pour la première fois son importance culturelle dans la quête de cette drogue utilisée par les Indiens. Cette édition comporte également des textes inédits de Burroughs et de Ginsberg, lesquels nous permettent de mieux comprendre les déambulations des deux écrivains dans le monde de l'exploration et de l'écriture.
Enrique vila-matas est né à barcelone en 1948. il commence à écrire vers 12 ou 13 ans. a 18 ans, il est embauché comme rédacteur dans une revue de cinéma barcelonaise, fotogramas, pour laquelle il réalise parfois de fausses interviews. en 1974, il rencontre marguerite duras à paris. elle lui louera sa chambre de bonne pendant deux ans. de retour à barcelone en 1976, enrique vila-matas se consacre à l'écriture et collabore à des journaux. abrégé d'histoire de la littérature portative est son premier succès. il a depuis obtenu le prix herralde de novela en 2002, le prix de la critique en 2003 et le prix médicis étranger en 2003 pour le mal de montano.
« Réunissant les chroniques de « choses vues » et d'événements de la vie personnelle d'Ernst Jünger, deuils, doutes, rencontres et aventures, ces journaux de guerre et d'occupation, qui couvrent la période de sa vie au presbytère de Kirchhorst dans le Hanovre de 1939 à 1948, ont aussi le caractère ésotérique d'un voyage initiatique. Ce dernier aspect apparaît plus clairement que jamais dans ce dernier volume, à la fois descente aux Enfers et, même aux pires moments, contact avec les sources de la vie profonde : le retour au pays natal, celui de l'enfance, où les villes sont détruites, mais la campagne et les rythmes de l'existence paysanne immuables ; le retour auprès des siens, dont la sollicitude et la tendresse le protègent à travers les misères et les dangers de l'occupation ; enfin, retour au passé et tentative de ressaisir dans la mémoire les débuts d'un glissement vers l'abîme du nihilisme absolu, dont Jünger touche le fond, avec tous ses compatriotes, en 1945.
Selon ses centres d'intérêt, le lecteur trouvera dans ce volume, [enrichi d'un texte intitulé le « feuillets de Kirchhorst »], un témoignage sur des faits mal connus en France, les premières années de l'après-guerre en Allemagne ; la relation d'un itinéraire spirituel ; ou, plus profondément, un dessin qui peut s'appliquer à toute existence en esprit, un art de mourir pour renaître, selon le précepte du vieux Goethe. » (Henri Plard)