La conversation n'est pas qu'un passe-temps destiné à nous divertir : elle est une occasion d'entrelacer notre existence à celle des autres, en toute liberté et selon notre humeur.Mais comment la distinguer du dialogue ou de l'entretien ? La correspondance et la causerie ne sont-elles pas des formes plus achevées de la conversation ? Pouvons-nous converser avec Dieu, avec les poètes, entre amoureux ? Comment éloigner les goujats, les fâcheux, qui n'ont rien à attendre de nous, les ironistes aussi, à la froideur dérangeante ?Dans cette satire joyeuse, la conversation n'est plus considérée comme l'apanage des nantis. Chacun de nous peut y participer. Nous découvrons alors notre capacité à plaire et à savoir écouter.
Pierre Sansot (1928-2005) a enseigné la philosophie et l'anthropologie aux universités de Grenoble et Montpellier. Il a notamment publié : Poétique de la ville, Le Rugby est une fête ou Du bon usage de la lenteur.
On ne résume pas un tel ouvrage - monumental, riche et foisonnant. Disons simplement qu'il est le résultat d'un pari insensé : qu'un homme puisse, à lui seul, s'emparer de la ville et nous en restituer toutes les facettes, tous les secrets.
Qu'il s'agisse de l'arrivée sous la pluie dans une petite ville, des manifestations de rue, des dérives nocturnes ou des promenades matinales, des rythmes urbains, de la symbolique de la rue, du carrefour ou du boulevard, des
transports (bus, taxi, métro), de personnages emblématiques (prostituée, clochard), des quartiers et faubourgs, ou encore des intérieurs (hôtels, studios, salles de bain, de séjour), on se laissera donc porter par la prose d'un Sansot éblouissant, au gré de ses intuitions malicieuses et de sa géographie sentimentale.
Existe-t-il un imaginaire collectif qui s'exprimerait non pas tant dans les productions éminentes, les grands mythes archaïques, mais dans la vie quotidienne de groupes ? Dans leur façon de s'emparer de l'espace, de partager leurs jours et leurs nuits ? À travers la description des banlieues, des foules, des cérémonies sportives, du ferroviaire, Pierre Sansot nous rend présentes ces créations de mythes et de rites, par lesquelles une société s'assure ludiquement de son existence. En sensibilisant le concept l'auteur capte notre modernité : les mille lieux de nos dérives, tout ce qui échappe généralement aux procédures de la sociologie.