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C'est en mai 1888, quelques mois avant de sombrer dans la folie, que Nietzsche écrit Le Cas Wagner. Ses relations avec le compositeur ont toujours été passionnées, faites d'admiration et de répulsion. S'il a d'abord vu dans l'oeuvre de Wagner l'illustration géniale de ses propres conceptions de l'artiste tragique et dionysiaque, Nietzsche va s'éloigner rapidement de lui. Fondamentalement, il reproche au compositeur d'être un «menteur». Wagner joue à l'artiste de la puissance, alors qu'il est un musicien de la dégénérescence. Il joue à l'affirmateur de la vie alors qu'il est négateur. On le voit, la critique nietzschéenne de Wagner, loin d'être une attaque ad hominem mêlée de rancoeur, rejoint les thèmes les plus fondamentaux de sa pensée. C'est en 1876 que Nietzsche a rompu avec Wagner, et cette date n'est pas indifférente. C'est en effet l'année du premier festival de Bayreuth, qui consacre le musicien comme le pontife du nouvel art allemand. Seul véritable pamphlet écrit par Nietzsche, Le Cas Wagner est en effet moins dirigé contre l'auteur de Parsifal lui-même que contre tout ce que le wagnérisme incarne et que Nietzsche vomit : l'idéologie allemande et son exaltation des vertus morales, du nationalisme, de l'antisémitisme, son mépris de l'intelligence. Nietzsche résume tout cela d'une formule : « le crétinisme de Bayreuth». Contre cet esprit de lourdeur, il exalte la gaieté de Carmen. «Il faut méditérraniser la musique !», écrit-il.