Pourquoi notre monde est-il en train de devenir fou ? Bernard Stiegler signe un livre fondamental sur les ressorts d'une société qui a vendu le souci d'humanisation au diable d'une technologie aveugle. Avec la connexion planétaire des ordinateurs, des smartphones et des foules, les organisations sociales et les individus qui tentent de s'approprier l'évolution foudroyante de la technologie arrivent toujours trop tard - à tel point qu'ils sont à présent au bord de l'effondrement. C'est ce que l'on appelle la disruption. Cette immense puissance installe un immense sentiment d'impuissance qui rend fou.
Ars Industrialis Réenchanter le monde Paul Valéry, pressentant la catastrophe où menait le nazisme, constatait dès 1939 une « baisse de la valeur esprit ». Aurait-il pu imaginer dans quel état de déchéance généralisée tomberait l'humanité quelques décennies plus tard - là où nous en sommes ? En 1939, seulement 45 % des Français écoutent la radio, et la télévision n'existe pas encore. En ce début de XXIe siècle, les objets communicants poursuivent les temps de cerveaux disponibles où qu'ils aillent, du lever au coucher. Un capitalisme s'est imposé, que l'on dit tantôt « culturel », tantôt « cognitif », mais qui est avant tout jusqu'à présent l'organisation ravageuse d'un populisme industriel tirant parti de toutes les évolutions technologiques pour faire du siège de l'esprit un simple organe réflexe : un cerveau rabattu au rang d'ensemble de neurones, un cerveau sans conscience. En 2005, le Medef réunissait son université d'été sous la bannière du « réenchantement du monde ». Ce livre propose de le prendre au mot : réenchanter le monde, c'est nécessairement revisiter et réévaluer le rôle de l'esprit dans l'organisation de l'économie.
Réflexion sur l'impact de la société de consommation sur la production et la diffusion de symboles et la diversité des individus en matière de mentalité, d'intellect, d'affects et de jugement esthétique.
Après le succès de librairie de «Dans la disruption», faisant même entrer le terme « disruptif » dans le Larousse, le philosophe Bernard Stiegler s'intéresse à l'ère de la post-vérité. Dans ce deuxième tome, qui succède à «L'immense régression» le célèbre philosophe s'attache à comprendre les grandes mutations à l'oeuvre dans nos sociétés contemporaines.
La télécratie contre la démocratie La télécratie qui règne désormais en France comme dans la plupart des pays industriels ruine la démocratie : elle remplace l'opinion publique par les audiences, court-circuite les appareils politiques et détruit la citoyenneté. La télévision et l'appareil technologique qui la prolonge à travers les réseaux numériques de télécommunication sont en cela devenus le premier enjeu politique. À travers ce que l'on appelle les industries de programmes, c'est la relation politique elle-même qui est devenue un nouveau marché, et ce marketing confine aujourd'hui à la misère politique : au cours de la dernière décennie, l'appareil télécratique a développé un populisme industriel qui engendre à droite comme à gauche une politique pulsionnelle, et qui semble conduire inéluctablement au pire. Ce devenir infernal n'est pourtant pas une fatalité. La philosophie se constitua à son origine même contre la sophistique : celle-ci, par une appropriation abusive de l'écriture, développait une gangrène qui menaçait de guerre civile la cité athénienne. De cette lutte contre les tendances démagogiques de la démocratie grecque résultèrent les formes de savoirs qui caractérisent l'Occident. Prônant un nouveau modèle de civilisation industrielle, cet ouvrage affirme qu'un sursaut démocratique contre les abus de la télécratie est possible, et appelle l'opinion publique française et européenne à se mobiliser contre la dictature des audiences.
Un refus de la numérisation généralisée et d'une tendance à l'automatisation biologique, psychologique, sociale et technologique que l'essayiste dénonce comme une automatisation des esprits. Il souhaite opposer à ce qu'il nomme un neuropouvoir une néopolitique, où les technologies automatiques seraient au service de l'esprit critique des individus.
Qu´on l´admette ou qu´on le dénie, chacun sent bien qu´à présent l´avenir de la vie terrestre se trouve mis en jeu dans une urgence inouïe. Et chacun sait que, depuis la séquence historique qui s´est engagée en 2007 et qui paraît avoir déclenché ce qu´on appellerait en physique nucléaire une réaction en chaîne, chaque pas compte et semble se surcharger systémiquement de conséquences très difficilement réversibles - sinon absolument irréversibles.
Cette crise est sans précédent d´abord en cela. Si krisis signifie bien et d´abord décision, elle est critique comme jamais : elle révèle que le destin humain - qui est un destin inéluctablement technique et technologique - est pharmacologique au sens où, en grec, le pharmakon est à la fois le remède et le poison.
Le pharmakon est à la fois ce qui permet de prendre soin et ce dont il faut prendre soin - au sens où il faut y faire attention : c´est une puissance curative dans la mesure et la démesure où c´est une puissance destructrice. Tel est aussi le feu dans la mythologie grecque. Devenu technologie industrielle, le pharmakon est de nos jours hégémoniquement contrôlé par l´économie, c´est-à-dire par le marketing, et c´est une calamité. Cet état de fait, qui a installé une économie de l´incurie génératrice d´une bêtise systémique, signifie que la question du soin - que l´on appelle aussi le care - est une affaire d´économie politique, et non seulement d´éthique.
L´impression que la déraison domine désormais les hommes accable l´esprit de chacun de nous, qui assistons aux effondrements systémiques, à des fonctionnements dévoyés ou irresponsables, à des actes de folie en tous genres. Que la rationalisation qui caractérise les sociétés industrielles conduise à une régression vers la déraison n´est pas une question nouvelle. Les philosophes de l´École de Francfort avaient averti dans leur analyse des industries culturelles du danger et de la nécessité de se prémunir contre ce retournement. Or cette question a été abandonnée. Plus grave, l´Université est touchée. Si l´Université n´est plus guidée par le savoir, où allons-nous ? Bernard Stiegler alarme : la raison s´est dé-formée, avec la transformation des rapports au savoir induite par le « désencastrement » du marché, l´extension du management, les nouvelles technologies - phénomènes qui conduisent à un regain de scientisme et à une prolétarisation des esprits. La raison est un état à la fois mental et social essentiellement précaire - et c´est peut-être là ce que nous, les tard-venus du XXIe siècle, découvrons : la « conquête » de la raison reste toujours à faire et à défendre.
L'artiste est une figure exemplaire de l'individuation psychique et collective, telle qu'un je n'est qu'au sein d'un nous, et telle qu'un nous est constitué à la fois par le potentiel sursaturé et tendu du fonds pré-individuel que suppose ce processus, et par des dia-chronies en quoi consistent les je à travers lesquels il se forme.
Ce processus est un flux lui-même constitué de tourbillons : les tourbillons sont des flux en spirales formant au sein du flux des contre-courants sans fin. ces contre-courants reconduisent cependant au courant par leurs courbures singulières, et sont ainsi - à contre-courant - la réalité du courant dominant. un artiste est un tourbillon d'un type particulier dans ce flux : il est investi d'une tâche dans la préparation du fonds pré-individuel des je et des nous à venir.
Et, en même temps, il est un opérateur de trans-individuation du pré-individuel disponible : il crée des oeuvres, c'est-à-dire des artefacts, qui ont pour caractéristique d'ouvrir l'à-venir comme singularité de l'indéterminé par un accès au refoulé qui trame la puissance de ce qu'aristote nommait l'âme noétique, et comme sa possibilité - qui n'est que par intermittences - de passer à l'acte. c'est un accès au sauvage.
Le sauvage, comme double tendance d'un fonds pulsionnel liable, est ce que le désir sublimé apprivoise mais ne domestique pas. et le sauvage, non sublimé, retourne à sa pure sauvagerie. l'art, et l'esprit oú il advient, sont les noms de cette sublimation, et ils sont aujourd'hui gravement menacés. ce qui signifie que le sauvage brut est partout menaçant. ce livre présente le projet d'une organologie générale et d'une généalogie du sensible - en vue de penser ultimement la sauvagerie de notre temps.
Il poursuit l'analyse qui a été avancée dans des ouvrages antérieurs de l'économie libidinale propre au capitalisme hyperindustriel, principalement à travers la question de l'art, comme liquidation de l'économie de la sublimation sous toutes ses formes. il s'agit de fourbir des armes : de faire d'un réseau de questions un arsenal de concepts, en vue de mener une lutte. le combat à mener contre ce qui, dans le capitalisme, conduit à sa propre destruction, et à la nôtre avec lui, constitue une guerre esthétique.
Elle-même s'inscrit dans une lutte contre un processus qui n'est rien de moins que la tentative de liquider la " valeur esprit ", comme disait valéry.
La place que j'ai accordée à la technique dans ma pensée a été ménagée par le fait que j'ai adopté dès ma jeunesse de lycéen une vision matérialiste de la chose politico-philosophique.
Je me considère encore matérialiste, bien que voyant dans le matérialisme ordinaire une forme de métaphysique très vulgaire et archaïque. pour autant, au cours de mon histoire proprement philosophique, qui a commencé assez tardivement, et en quelque sorte par accident, la question ne fut pas d'abord la technique, mais bien la mémoire, et, à travers platon, la réminiscence comme la possibilité même de savoir, autrement dit, comme l'origine du savoir.
C'est sur ce chemin de la mémoire que j'ai retrouvé la technique : il m'est apparu plus tard que la technique était le coeur même de cette question de la mémoire. je ne me considère pas comme un " philosophe de la technique ", mais plutôt comme un philosophe qui tente de contribuer avec quelques autres à établir que la question philosophique est, et est de part en part, l'endurance d'une condition que je dis techno-logique : à la fois technique et logique, d'emblée forgée sur la croix que forment le langage et l'outil, c'est-à-dire ce qui permet à l'homme son extériorisation.
Or, l'extériorisation techno-logique est un accident, c'est-à-dire un défaut : un défaut d'origine autant qu'un défaut originaire. entre " l'origine " et " la fin ", mais aussi à l'origine et à la fin, au cours du temps et comme ce cours, se tient un processus accidentel, et non seulement essentiel, tel que des choses arrivent, qui font que, contrairement à l'illusion métaphysique, la fin n'est pas déjà là dans l'origine.
C'est cette accidentalité (et la généalogie qu'elle appelle) que la philosophie doit savoir penser : la penser, c'est-à-dire en faire une nécessité du défaut, un défaut qu'il aura fallu. cette accidentalité est le sens premier de la technique, dont la philosophie doit être capable de dire non pas l'essence, mais la nécessité, contre le danger toujours imminent de la vanité, de l'absurde et de l'im-motivé, de l'ir-rationnel : la raison est d'abord le motif.
Telle est sa responsabilité du philosophe - par accident, et par défaut.
La dissémination des technologies numériques dans toutes les couches sociales de tous les pays industrialisés transforme inexorablement les relations entre les individus, les groupes, les générations et les nations. La croissance spectaculaire des réseaux sociaux affecte tous les milieux, et vient transformer les règles du jeu socio-économique dans son ensemble, tant pour les individus que pour les entreprises et organisations, et dans tous les domaines de la vie. Or - en première analyse - ces nouveaux réseaux peuvent sembler des réseaux non sociaux, voire même antisociaux. Ils sont en effet généralement coupés de ce qui caractérisait jusqu'alors le social : lié à un territoire, à une langue, à un héritage (religieux, politique ou culturel au sens le plus large), légué par des générations d'ascendants, et qui précède en principe le social comme son passé, comme un sol commun. Cet ouvrage, dirigé par Bernard Stiegler, propose les meilleures contributions aux Entretiens du Nouveau Monde Industriel sur les réseaux sociaux. Il montre comment ces technologies relationnelles bouleversent non seulement les règles traditionnelles de l'économie et de l'industrie, mais également, et plus profondément, le processus d'individuation psychique et collective. Il propose une analyse approfondie des conditions sociologiques et psychologiques qui président à la constitution de ces réseaux sociaux. Il étudie leurs conséquences économiques et organisationnelles, et identifie les opportunités d'innovation sociale, les enjeux politiques et les menaces afférents à cette émergence du " social engineering ". Enfin, il explore les règles de constitution et de développement des réseaux sociaux du web 3.0 (alliance du web sémantique et du web social), et également les conditions économiques et éthiques d'administration de ces nouveaux milieux, c'est-à-dire les questions de la gestion, du contrôle, de la transparence et de l'e-démocratie, ainsi que les technologies et les stratégies industrielles déjà mises en oeuvre ou à venir.
Le système technique mondial repose désormais intégralement sur les technologies numériques.
Une conséquence majeure de cet état de fait est l'intégration fonctionnelle des mnémotechnologies au système de production des biens matériels, ce qui constitue une immense rupture historique : ce sont les dispositifs de production des symboles, qui relevaient jusqu'alors des sphères de l'artistique, du théologique, du juridique et du politique, qui sont désormais totalement absorbés par l'organisation mondiale du commerce et de l'industrie.
La production symbolique est hégémoniquement contrôlée par les industries culturelles dans la mesure où celles-ci se sont emparées des dispositifs rétentionnels qui configurent le temps dans sa forme la plus pure : comme flux de conscience.
C'est précisément sous ce nom d'industrie culturelle qu'Adorno et Horkheimer dénoncèrent ce devenir industriel de l'activité de l'esprit, c'est-à-dire sa soumission exclusive aux critères marchands de sélection.
Ils y virent une perversion de cette opération de l'imagination transcendantale que Kant appelle le schématisme. Selon eux, une telle perversion fut rendue possible par un processus d 'extériorisation technique du processus de production des schèmes, en laquelle ils voyaient le comble de l'aliénation des esprits et des corps.
Le tempe du cinéma et la question du mal-être veut montrer à la fois l'urgence de cette question, la grande faiblesse de cette analyse, et la nécessité de procéder, face au fait historique de l'industrialisation de l'esprit, à une critique des attendus de la Critique de la raison pure quant à l'analyse du schématisme.
Cette critique sera menée à partir du cinéma, pour conduire à une analyse de l'activité de la conscience - et de son producteur, l'inconscient - comme étant originairement un processus de production cinémato-graphique, ce qui confère aussi à cet ouvrage une portée géopolitique : Hollywood devient ainsi la Métropolis du monde.
Si le cinématographe peut pénétrer les flux des consciences au point de donner parfois l'impression qu'il les contrôle, surtout lorsqu'il devient télévision, c'est parce que !a conscience est elle-même avant tout projection, tout aussi bien que montage et réalisation d'un flux temporel où les flux en quoi consistent les objets cinématographiques se coulent, s'écoulent, se moulent, et moulent en retour le matériau des masses de consciences auxquelles l'industrie s'adresse à travers eux.
Car les marchés sont avant tout des consciences.
Or, l'intégration des industries du symbole et de la logistique est ce qui permet, lorsque le cinéma devient télévision, un contrôle total des marchés en tant qu'ensembles de flux de consciences qu'il s'agit de synchroniser.
Cependant, une conscience est essentiellement libre, c'est-à-dire diachronique, c'est-à-dire exceptionnelle, singulière, irréductiblement mienne.
De cet état de fait qu'habite une contradiction explosive résulte un profond mal-être - un mal-être historique que l'on n'ose plus appeler une " époque de l'être ", mais plutôt une épreuve du devenir vécu comme non-être, c'est à dire comme devenir mauvais : comme néant.
Ainsi s'ouvre à nouveau la question du mal.
Histoire du mouvement artistique qui dénonce les effets de l'activité humaine sur l'environnement et met en pratique les principes du développement durable en réalisant des oeuvres éphémères, en utilisant des matériaux recyclés ou encore en favorisant la création collaborative.